💨 Le résumé pour celles et ceux qui scrollent trop vite
Le CBD (cannabidiol) n’est pas juste une huile tendance mais aussi un outil de réduction des risques pour beaucoup.
Pendant que certain·es s’apaisent, les autorités, elles, resserrent la vis.
Entre santé, liberté et commerce, l’équilibre est plus fragile qu’il n’y paraît.
🌿 En bref
Derrière le boom du CBD (composant non psychotrope du chanvre, prisé pour ses effets relaxants) – huiles, infusions, cosmétiques et même friandises pour animaux – se joue une bataille entre santé publique, économie et libertés individuelles.
Alors que 10% des adultes français déclarent en avoir consommé, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) proposait, il y a quelques mois, de le classer « toxique pour la reproduction », menaçant un marché en plein essor.
Pourtant, le cannabidiol reste un outil reconnu de réduction des risques : il aide à diminuer la consommation de cannabis, apaise l’anxiété, soutient les sevrages et redonne un espace au plaisir sans dépendance.
La politique actuelle, trop répressive, oublie celleux qui, derrière les chiffres, cherchent simplement à prendre soin d’elleux autrement.
Entre encadrement nécessaire et dogmatisme, le CBD interroge surtout notre capacité collective à faire confiance aux usager·es et à leurs savoirs d’expérience.
10% : c’est le pourcentage d’adultes qui déclaraient avoir consommé du CBD (cannabidiol) dans les douze derniers mois en 2022. Chez les jeunes adultes (18-34 ans), ce sont 27,6% qui l’ont déjà expérimenté, et 17,5% qui en ont consommé dans l’année. Ces dernières années, le cannabidiol, composant non psychotrope du chanvre, prisé pour ses effets relaxants, est devenu très populaire.
En 2020, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait ouvert la voie à la libre commercialisation du CBD, jugeant qu’il ne pouvait pas être assimilé à un stupéfiant. En France, le Conseil d’État avait confirmé cette ligne, annulant l’interdiction de vente des fleurs et feuilles de chanvre à faible teneur en THC (inférieure à 0,3%).
Mais derrière cette reconnaissance juridique, la question de la sécurité d’usage du CBD n’a jamais vraiment quitté la table des autorités sanitaires. Et c’est justement sur ce point que la situation pourrait se tendre à nouveau.
Il y a quelques mois, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) avait proposé de classer le CBD comme substance « toxique pour la reproduction », sur la base d’études animales suggérant des effets potentiels sur la fertilité. Si cette classification était adoptée, elle pourrait imposer des obligations d’étiquetage renforcées, voire restreindre certaines formes de vente (notamment les e-liquides, huiles et compléments).
L’agence met également en garde contre la prolifération de produits mal contrôlés, parfois contaminés par du THC ou des cannabinoïdes de synthèse. Ces dérives inquiètent d’autant plus les autorités que la popularité du CBD ne cesse de croître : huiles, infusions, cosmétiques, friandises pour animaux… le marché est en pleine effervescence.
Vers une harmonisation européenne
Au niveau européen, la Commission travaille à une harmonisation du cadre légal du chanvre et du CBD, afin d’éviter le patchwork réglementaire actuel. Un projet de directive, attendu pour 2025, devrait fixer :
- un seuil maximal de THC à 0,3% pour tous les produits issus du chanvre ;
- une liste commune des variétés autorisées ;
- et des normes de sécurité pour les produits contenant du cannabidiol.
Cependant, chaque pays garde la main sur la mise en œuvre nationale. En Italie et en France, par exemple, les autorités ont tenté d’interdire la vente des fleurs de chanvre, une décision actuellement examinée par Bruxelles et annulée par le Conseil d’État dans l’Hexagone. L’Allemagne, de son côté, avance vers une régulation plus ouverte dans le sillage de la légalisation partielle du cannabis récréatif.
Un marché sous tension
Pour les professionnel·les du secteur, ces incertitudes représentent un véritable casse-tête. Les producteurices et commerçant·es français·es, déjà échaudé·es par les volte-face réglementaires des dernières années, redoutent de nouvelles contraintes qui pourraient freiner le développement d’une filière en plein essor.
Les prochains mois seront décisifs. Si la classification du CBD comme substance toxique est confirmée, elle marquera un tournant pour le marché français et européen. Entre encadrement sanitaire et protection du commerce légal, les États membres devront trouver un équilibre subtil.
Une chose est sûre : longtemps présenté comme une alternative douce au cannabis, le CBD entre dans une nouvelle phase de régulation plus stricte mais aussi plus décisive pour son avenir économique.
Un outil de réduction des risques en danger
Au-delà des effets de mode, le CBD est aujourd’hui considéré par de nombreux·ses acteurices de santé et de prévention comme un outil potentiel de réduction des risques liés à la consommation de cannabis ou d’autres substances psychoactives.
Le cannabidiol agit sur le système endocannabinoïde mais n’a pas d’effet psychotrope, il ne provoque ni euphorie ni altération de la perception. Plusieurs études (Inserm, OFDT, Santé publique France) suggèrent qu’il pourrait aider certain·es consommateurices de cannabis à réduire ou arrêter leur usage de THC, la principale molécule responsable des effets planants et des risques d’addiction.
Dans les enquêtes de terrain, notamment celles menées par l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), de nombreux usager·es déclarent utiliser le CBD pour :
- Diminuer la fréquence de consommation de cannabis classique ;
- Atténuer les symptômes de manque lors d’un sevrage ;
- Remplacer le geste (fumer ou vapoter) par un produit perçu comme plus sûr ;
- Gérer l’anxiété, les troubles du sommeil ou la douleur, souvent à l’origine du recours au cannabis.
Une étude de 2023 de l’université de Clermont-Auvergne (programme Cannareduce) a montré que près de 30% des consommateurices régulier·es de cannabis interrogé·es avaient déjà utilisé du CBD comme substitut, avec une baisse moyenne de 50% de la consommation de THC dans les trois mois suivant l’usage de CBD.
Tout indique donc que le CBD trouve sa place comme outil de réduction des risques pour nombre de consommateurices et peut constituer un tremplin pour se sevrer du THC, sans faire disparaître le côté plaisir et détente. Il peut aussi être source d’apaisement pour des douleurs physiques et un soutien dans des situations psychiques particulières. Dans sa politique répressive et ses positions dogmatiques, le gouvernement néglige, une fois de plus, les parcours individuels et leurs spécificités.