Amy Winehouse (Marisa Abela) & Blake Fielder-Civil (Jack O'Connel) dans les rues de Camden London - Back To Black 2024
Amy Winehouse (Marisa Abela) & Blake Fielder-Civil (Jack O'Connel) dans les rues de Camden London - Back To Black 2024

Back to Black – Ascension et chute d’une star

Publié le 26 avril 2024 par Maxime

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Cet article parle de : #addiction #culture #films #histoires-vraies

Un mélodrame musical librement inspiré de la courte vie d’Amy Winehouse. Triste et beau. 

Amy est au début de sa carrière et chill avec sa famille décomposée (ses parents sont séparés de longue date), elle aime faire la fête et se produire dans des pubs de Camden.
Rapidement, avec le soutien de ses parents et d’un copain manager, elle signe chez une major pour produire un premier album qui sera un succès. Elle rencontre Blake, son love interest tragique qui marquera pour toujours sa discographie (la chanson Back to Black lui est notamment dédiée). Mais en fait Blake est déjà avec une meuf, mais en fait il la quitte pour Amy, mais en fait il quitte Amy pour se remettre avec cette meuf, mais en fait le succès aidant Blake revient dans la vie d’Amy. Amy qui oscille en mal et très mal car elle perd sa grand-mère adorée Nan, son repère dans la vie et subit difficilement les assauts des paparazzi, de ses producteurs et son chagrin d’amour. Parallèlement,  on découvre qu’Amy souffre de trouble du comportement alimentaire et entretient une relation trouble avec l’alcool.
S’ensuivent des scènes d’amour familial, scènes de perdition, prestations musicales, consommation de drogues et crises de nerfs.
Après avoir « touché le fond », Amy se rend en cure, rafle plusieurs prix au Grammy Awards et s’offre une belle demeure à Camden. Dans un dernier dialogue avec son daron, elle explique que tenir la sobriété demande un effort conséquent. Le film se termine sur un carton expliquant qu’elle sera retrouvée inanimée le 27 juin 2011, victime d’une surdose d’alcool après une longue période d’abstinence. Au total, l’action du film se déroule sur la période des 18 à 27 ans de la chanteuse.

Une jeune femme amoureuse 

Le film est plutôt bon si l’on arrive à passer outre le fait que l’actrice principale ne ressemble pas vraiment à la chanteuse. C’est bien fait, on ne s’ennuie pas et l’accent n’est ni trop mis  sur les frasques ni trop sur la consommation de drogues, en fait on suit une jeune femme amoureuse (et notamment aimante de l’idée même d’amour) qui sera touchée fortement par les épreuves qu’elle traversera. Pour le coup, le côté musical est vraiment peu mis en valeur, on ne voit pas qu’Amy était une bourrelle de travail, qu’elle était très exigeante ni qu’elle était autrice de ses chansons, elle n’était pas qu’une parolière ou une interprète. Il y a tout de même des numéros musicaux ni bons ni mauvais : l’émotion est là mais les mouvements de lèvres semblent mal synchronisés. 
Ce qui est flagrant, c’est que se revendiquant électron libre, Amy semble souffrir d’un manque d’autonomie. De la part de son père qui la couve particulièrement, de la part de ses producteurs qui la brident et cherchent à la façonner, de la part de son amant Blake qui l’initie plus ou moins directement à toutes sortes de toxicités ou encore par la faute des paparazzi qui se repaissent de chacune de ses frasques ou la harcèlent et la provoquent carrément. Une tension permanente qui ferait péter un boulard à beaucoup d’entre nous.  
Du reste, on trouve que le film prend le temps de donner une représentation nuancée de la conduite addictive, même s’il manque un peu d’explications et que de nombreuses choses sont suggérées. C’est une bonne porte d’entrée pour qui voudrait se pencher sur ces mécanismes complexes qui peuvent déboucher sur de grosses mises en danger (de soi, d’autrui) liées à l’abus de substances. En ne tombant pas dans le piège de la diabolisation de l’usage, ni au contraire dans le tout aussi dangereux écueil « drogues = cool et rebelle », le film permet de faire passer un message qui pourrait être : « Vos proches tristes peuvent se mettre en danger malgré eux, n’attendez pas pour vous pencher sur leur cas (même si vous n’êtes ni tout-puissant ni complètement impuissant). »
Pour approfondir ce sujet, on vous conseille de lire ce (très cool) article publié sur le média The Conversation « Back to Black » : le film sur Amy Winehouse, du point de vue d’une experte en alcoolisme
Pour une vision moins romancée et certainement plus fidèle à la vie d’Amy, vous pouvez aussi visionner Amy de Asif Kapadia sorti en 2015 et gagnant de l’Oscar du meilleur film documentaire. Un film désavoué par papa Winehouse (qui produit Back To Black) dans lequel il a un rôle autrement moins chouette, évoqué dans cet article du Point titré sobrement Le père d’Amy Winehouse est-il responsable de sa mort ?. On ne sait pas ce que ça vaut, mais il est bon de rappeler que Mitchell Winehouse est à l’initiative de la Amy Winheouse Foundation fondée seulement trois mois après le décès de la chanteuse. 
 

 

Alcool drogue dure  & cure de désintox 

 
Il y a cependant un point sur lequel on voudrait insister. Celui du rapport trouble que les personnes dépendantes et leurs proches peuvent entretenir avec la notion de « cure de désintox » (el famoso Rehab). Une cure de désintoxication peut avoir de nombreuses formes, et  la clé de son succès, c’est souvent d’être séparé de son contexte habituel et d’être occupé à penser à autre chose. À  la sortie d’une cure, on peut être exposé rapidement aux produits, et il est possible qu’une dose « habituelle. » nous fasse bien plus de mal qu’avant la cure. Une période d’abstinence peut baisser le seuil d’accoutumance et donc maximiser les effets d’un produit qu’on n’a pas consommé depuis longtemps. Et plus la période d’arrêt est longue, plus cette accoutumance peut diminuer. 
Il est aussi bon de rappeler que l’alcool est la première des drogues consommées en France (même si la tendance est globalement à la baisse), que l’initiation des jeunes peut avoir lieu au sein même des familles dans lesquelles des troubles de l’usage peuvent exister (ce qui donne un exemple malheureux aux plus jeunes). Aujourd’hui, l’alcool est omniprésent sur les réseaux sociaux notamment à travers d’innocents partenariats avec des influenceurs (l’association Addiction-France fait un travail formidable à ce sujet). L’alcool est à l’origine de l’augmentation d’accidents de la route, d’accidents domestiques, de violences intrafamiliales ainsi qu’une excuse souvent utilisée pour justifier des violences sexuelles. Si les risques liés à l’alcool sont souvent des risques à long terme (cirrhose, fibrose, stéatose, troubles mentaux, syndrome de Korsakoff, etc.), une surdose d’alcool peut tuer un être humain aussi sûrement qu’une surdose d’héroïne (produits qui sont tous deux des dépresseurs du système nerveux central). C’est bien les 4 grammes d’alcool par litre de sang retrouvés dans la dépouille d’Amy Winehouse qui l’ont tuée.  
 
Pour conclure, on vous recommande ce film si vous êtes capable de déployer de la compassion et de l’empathie. Si vous souhaitez regarder un film musical ou un film de drogué, passez votre chemin.
 Et ne pas oublier que des  mêmes épreuves ne provoquent les mêmes réactions chez des personnes différentes.

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