
Disponible sur arte.tv, la mini–série galloise Lost Boys and Fairies, inspirée de la vie de son créateur Daf James, raconte bien plus que la procédure d’adoption d’un couple homosexuel. Marrante et émouvante, à regarder d’une traite un dimanche après-midi.
L’un passionnel et intense, l’autre pragmatique et calme, l’un performeur dans un cabaret, l’autre comptable… À Cardiff, Gabriel (Siôn Daniel Young) et Andy (Fra Fee) forment un couple que tout oppose mais pourtant profondément lié. Après huit ans de relation, ils décident de se lancer dans une procédure d’adoption. C’est alors que Jackie (Elizabeth Berrington), l’assistante sociale en charge de leur dossier, fait irruption dans leur salon et, surtout, dans leur intimité et leur passé.
Dans cette mini–série galloise de 3 épisodes de 50 minutes, prix de la meilleure fiction européenne au Festival de La Rochelle, le·la spectateur·rice suit un couple homosexuel dans son cheminement vers la parentalité et dans le processus imposé par les services sociaux, qui réveille des traumatismes.
Ceux de Gabriel essentiellement. Ceux d’un enfant qui a perdu sa mère très tôt et a dû grandir seul avec un père diacre homophobe. Ceux d’un jeune garçon harcelé toute sa scolarité en raison de son orientation sexuelle, maltraité par ses camarades et par la société tatchérienne, ouvertement et profondément homophobe. Ceux d’un jeune homme qui, pour supporter toutes ces blessures, s’est perdu dans l’usage de drogues dans un contexte de chemsex. Et qui a réussi à en sortir grâce à un suivi adapté.
Une leçon de résilience
Au fil du récit, Gabe et Andy vont faire la rencontre de Jake, un enfant à l’histoire compliquée, marquée par la violence, et questionner, sans cesse, leur légitimité à l’aider.
Pourquoi une personne meurtrie et abîmée par la vie, une personne qui a traversé des épisodes de consommation intenses, et des périodes de santé mentale compliquées, ne pourrait-elle pas devenir parent ? Cette question semble traverser les épisodes. À travers le personnage, touchant et profond, de Gabriel, cette série met en lumière le sentiment d’illégitimité des personnes ayant vécu des traumatismes à s’occuper d’un·e enfant et, plus généralement, à accompagner les autres.
Elle raconte le cheminement intérieur et relationnel pour devenir parents mais elle raconte surtout comment l’être humain est capable d’outrepasser et sublimer ses blessures pour en faire une ressource infinie.
Si le propos est sérieux, et les sujets traités importants, les épisodes ne manquent pas pour autant de moments très drôles, grâce à l’humour piquant et cynique dont les séries britanniques ont le secret. De belles scènes musicales viennent entrecouper les moments d’intimité, et aussi les moments difficiles, symbolisant l’échappatoire trouvée par Gabriel dans le spectacle et dans l’appartenance à une communauté à son image.
Un message d’espoir pour de nombreuses communautés
Si le recours à l’amour et la bienveillance comme la solution à tout est parfois facile, et si les services sociaux sont clairement idéalisés, cette série porte un vrai message d’espoir : oui, quand on est une personne avec des traumatismes, quand on est un·e ancien·ne usager·e de drogues, on peut aussi être responsable, on peut aussi se servir de ses expériences pour aider les autres, on peut aussi s’occuper d’un·e enfant en difficultés, être l’épaule sur laquelle iel se repose, être un modèle fort et sécurisant. Une bonne piqûre de rappel à toutes celles et ceux qui, chaque jour, stigmatisent les ancien·nes et actuel·les usager·es, les personnes à la santé mentale fragile, les minorités de genre et d’orientation sexuelle et toutes les personnes dont les ressources intérieures sont bien plus importantes et solides que la société ne voudrait le croire. À regarder sur Arte jusqu’au 4 décembre 2025.