Aline Ruby (Léa Drucker) dans « Mars Express » réalisé par Jérémie Périn - 2023
Aline Ruby (Léa Drucker) dans « Mars Express » réalisé par Jérémie Périn - 2023

Mars Express – Alcool, violences et putes robots.

Publié le 22 mai 2024 par Maxime

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Cet article parle de : #culture #fictions

Mais que fait un film animé de science-fiction sur une page qui parle de drogue, de fête et de santé ? Est-ce une erreur ? Eh bien pas tant que ça, tant le film caractérise ses personnages avec des failles du réel qu’on voit trop peu au cinéma et qui entrent dans nos thématiques.

 

Le film commence dans une chambre où vivent deux jeunes femmes et un chat particulier. Un homme entre, armé, et procède à une exécution sommaire. Sans élément de contexte, on rencontre ensuite un robot qui procède à une visio dans une chambre d’hôtel. Il a un rendez-vous important et interdit. Un duo arrive, Aline et Carlos, trompent le duo et se lancent dans la capture des deux hors-la-loi puis générique stylé avec des vaisseaux spatiaux : on quitte la terre (un repaire à chômeurs) et on retourne sur Mars. 

Aline Ruby et Carlos Riviera sont un duo de détectives privés. Elle est humaine, lui un robot réplique de l’humain du même nom décédé au cours d’une mission des années plus tôt. Ils sont diligentés par un homme pour retrouver sa fille disparue sur un campus universitaire. Le mystère autour de la jeune humaine est rapidement éventé mais il soulève encore plus de questions. Dans une intrigue relativement courte (le film ne dure que 85 minutes) et resserrée, le film offre des pistes de réflexions très intéressantes quant à la condition humaine et aux différentes crises qui nous divisent aujourd’hui.  En prenant part dans un futur ultra technologique mais finalement assez proche du nôtre (l’an 2200), les questions d’acceptation, de capitalisme, de débridage de robots et les mœurs décrites ancrent le récit dans notre époque. La direction artistique ultra léchée et le parti pris de l’animation permettent de donner vie à cet univers bien mieux qu’avec n’importe quels comédiens et sans impression d’incrustation baveuse souvent provoquée par des budgets limités. 

  

Alcool, violences et putes robots

Aline est alcoolique. Alors certes, c’est un grand classique du film noir, le détective alcoolo ! Mais le traitement réservé à cette particularité du personnage est foutrement cool. Technologie futuriste et transhumanité en réseau font que sa présence sur un fichier de personnes alcoolodépendantes empêche les robots et les frigos connectés de lui permettre de se servir à boire. Plusieurs fois, les personnages (ceux qui la connaissent bien) l’interrogent sur son rapport à l’alcool. À un moment, l’IA Beryl discute avec elle et essaie de lui donner du courage pour ne pas sombrer dans l’ivresse. Une autre fois, alors qu’elle est sur le point de réaliser une manipulation qui exige une grande minutie, elle demande une verre d’alcool pour calmer ses tremblements. Les exemples sont nombreux, c’est agréable de voir un personnage féminin être stylé, impressionnant, efficace mais aussi doux, empathique et amusant. Le cinéma regorge de personnages archétypaux ou caricaturés, ici, c’est cool. Le film prend le contrepied des représentations habituelles et passe haut la main le test de Bechdel-Wallace. 

Carlos, quant à lui, est une réplique d’un homme tombé en mission. Il aimerait renouer avec « son » ancienne vie, mais l’homme qu’il réincarne était violent avec sa femme. Une ordonnance du juge lui interdit d’approcher sa veuve. Le sujet des violences intrafamiliales est un gros sujet et le voir aborder simplement dans la caractérisation d’un personnage ne tient pas de l’évidence. Qui plus est pour un des personnages principaux étiqueté gentil. 

L’enquête mène nos personnages à travers un bordel robotique dans lequel les humains viennent satisfaire leurs fantasmes tordus ou pas sans éthique, et aborde la question des étudiants et étudiantes qui vendent une partie de leur temps et de leur corps pour payer des frais de scolarité trop élevés. Une préoccupation de notre temps extrapolée de manière à s’intégrer dans l’univers du film. 

 

Le film est excellent, il ne prend pas son spectateur pour un débile et propose plein de pistes de réflexion qui dépassent le cadre de son histoire qui se tient et se termine à la fin du film sans faux suspense. Un film animé de qualité et français qui plus est : c’est banco ! La musique est géniale par ailleurs ! 

Mars Express est un film d’animation français d’une durée de 85 minutes sorti en 2023. Il est réalisé par Jérémie Périn produit par les studio Je suis bien content et Everybody on deck. Il met en scène Léa Drucker, Daniel Njo Lobé et Mathieu Amalric.

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