soumission chimique vulnérabilité chimique faire boire technique de drague violences sexuelles agression sexuelle
Photo de Isabella Mendes sur Pexels

Soumission chimique : non, faire boire ton crush pour le/la pécho ce n’est PAS une technique de drague

Publié le 6 juin 2023 par Lisa

/

Cet article parle de : #fete #consentement #culture-du-viol

La soumission chimique est une forme de violence sexuelle qui implique l’utilisation de drogues ou de substances pour affaiblir ou endormir une personne afin de la rendre vulnérable. On entend beaucoup de choses sur cette notion ces derniers temps, quelques éclaircissements pour lutter collectivement contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) en soirée.

La soumission chimique correspond à l’acte d’amoindrir les défenses psychiques et physiques d’une personne à l’aide de substances chimiques (par exemple l’alcool), des fins criminelles (vols, viols/agressions sexuelles). Très médiatisée ces dernières années, il s’agit d’un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur dans notre société, car largement sous-estimé pendant très longtemps. Depuis les années 1990, la communauté médicale internationale s’intéresse à ce phénomène. Les nombreuses études publiées ont permis de clarifier le sujet dans certains domaines tels que la toxicologie médico-légale et la pharmacologie des produits employés. Pourtant, un grand nombre d’inconnues persistent vis-à-vis de ce comportement.

L’étude de sa prévalence est rendue difficile par les difficultés à reconnaître les cas (quels que soient les dommages subis par les victimes). La prise en charge judiciaire se heurte à la nécessité de fournir des preuves matérielles analytiques permettant d’affirmer l’infraction. Des recommandations sanitaires locales et internationales ont vu le jour et font de la lutte contre la soumission chimique un enjeu de santé publique. Depuis le 5 août 2018, la loi n°2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes prévoit une aggravation des peines encourues en cas de viol ou d’agression sexuelle, après administration d’une substance à l’insu de la victime, afin d’altérer son discernement ou le contrôle de ses actes. Ainsi, il est fait mention à l’article 3 : « Le fait d’administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Lorsque ces faits sont commis sur un mineur de quinze ans ou sur une personne particulièrement vulnérable, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende. »

Boire un verre, ça permet de se désinhiber un petit peu, et d’oser, peut-être, enfin « communiquer » avec cette personne qui te tente depuis que tu l’as rencontrée ! Ça c’est okay, y’a pas de mal à se donner un petit coup de pouce pour se jeter à l’eau. Se donner un coup de pouce à soi-même, bien sûr. Si faire boire son crush a pu être présenté comme une « technique de drague » au cinéma ou à la télévision (ou même dans des livres), c’est bien, aux yeux de la loi, de la soumission chimique. Oui, car l’alcool est une substance psychoactive. Faire consommer des produits psychoactifs dans le but d’obtenir d’une personne quelque chose qu’elle ne voulait pas donner sobre, c’est de la soumission chimique.

La « légende » du GHB drogue du violeur nous est bien en tête et effectivement, le risque de G-hole (perte de conscience – l’expression ressemble au K-hole pour le même fonctionnement) est démultiplié par la prise d’alcool. Ces histoires ont été portées maintes fois à l’écran (notamment dans la série Veronica Mars, dans le décor des campus américains) et ont augmenté la vigilance des fêtard.es de l’époque. Alors que, contrairement aux USA, la menace du GHB reste très marginale en France. Les agresseurs n’ont pas besoin de produits illégaux pour commettre leurs actions : les benzodiazépines (mot compte triple !) figurent en tête de liste des drogues utilisées en France.

Le mécanisme de la soumission chimique possède aussi l’effet de culpabiliser la victime : « Je n’aurais pas dû me mettre dans cet état » ; « Tu aurais dû moins boire si tu voulais qu’il ne t’arrive rien ! » ; « Il/elle a pu te faire ça parce que tu n’étais plus maître de toi-même. » ; « Vous êtes sûr.e que vous n’étiez pas consentant.e ? » « Nous trouvons que votre histoire manque de cohérence, vous êtes sûr.e de vous, ce sont de graves accusations que vous portez là ? » ; « Ils/elles disent que vous mentez, que vous étiez d’accord. ». Et les cas de soumission chimique sont complexes à recenser, en cause : un manque de crédit apporté aux victimes, du personnel d’accompagnement jugeant sur les pratiques des victimes, le blackout qui empêche de se rappeler des détails, l’état de choc qui suit ce genre de trauma.

Sans sombrer dans la parano, toujours faire attention devient un réflexe. Un réflexe que certaines personnes apprennent d’une manière qui les marquera à vie, et qui parfois n’en parlerons jamais. Fais attention à toi, fais attention à tes potes. Mets les gens trop saouls en PLS et surveille-les, ok, c’est une charge mentale, mais toujours moins que d’apprendre qu’un.e ami.e a été abusé.e alors que tu étais là.

As-tu aimé cet article ?

Ceci pourrait aussi t'intéresser