On répète à l’envi que le consentement doit être libre, enthousiaste, éclairé, réversible et spécifique. Et que ne pas respecter ou demander le consentement fait de nous de potentiels agresseurs. On va vous parler des différentes formes de dépassements de consentement, en espérant que ça va vous permettre d’y voir plus clair.
La culture du viol telle qu’elle est omniprésente autour de nous véhicule des idées reçues qui sont dangereuses dans la vie des femmes et minorités de genre. Un monde où le désir des garçons est à satisfaire et où leur vie « d’homme » est scrutée et encouragée par les noyaux familiaux et où les femmes ne doivent pas être trop portées sur la chose, doivent dire non pour rester « respectables » et où les représentations culturelles insistent lourdement là-dessus (dès les dessins animés de l’enfance). Une société où les concepts de « Don Juan » et de « salope » s’opposent et où la loi du silence, la solidarité masculine et la culpabilisation des victimes freinent l’accès à la justice et découragent nombre de victimes.
Tous les dépassements de consentement ne donnent pas lieu à des traumatismes durables, en revanche assurément tous font de vous un être au mieux indélicat au pire coupable d’un crime (le viol par exemple). Il n’y a pas de comportement de victime ni de « contre-comportement » qui mettrait en lumière des mensonges ou des fausses accusations. Parfois une victime s’effondre, d’autres fois pas du tout, parfois le contrecoup se produira des années plus tard. IL N’Y A PAS DE RÈGLES EN LA MATIÈRE, et la thèse du comportement « suspect » de la victime est donc à oublier derechef.
La bise, la main au cul…
Pour commencer, la bise. Rappelez-vous quand vous étiez môme et que les adultes faisaient pression pour que vous claquiez une bise ? Bah c’est pareil : on n’en meurt pas mais on est quand même bien content que la Covida soit passée par là pour déconstruire cette obligation sociale à laquelle il est bien plus facile d’échapper aujourd’hui. Et avec tout son chapelet de trucs vraiment nuls comme celleux qui s’arrangent pour te biser trop près des lèvres ou celleux qui te laissent de la bave sur les joues comme les gosses. Le baiser volé, oui bien sûr, y’a bien des gens à qui ça peut faire plaisir, mais encore une fois, tout est question de « feeling ». Tout le monde apprécie une bonne tenue, restez-en là, au pire demandez pour la prochaine fois (un silence = non).
La main au cul, aux hanches, le chat-bite, l’olive, « tout cul tendu mérite son dû », « j’avais trop envie », « dans cette position, j’étais obligé », « non mais j’suis homo moi, c’est pas pareil », « mais ça va, c’etait une blague », etc. En gros, gardez vos mains pour vous : au mieux, la personne a la flemme de vous éduquer, au pire la personne n’ose plus se rebeller et c’est la 15e fois de la semaine qu’on lui « fait la blague ».
Alors oui, dans le milieu étudiant, chez les bons potes, etc., c’est la coutume, « nous, c’est pas pareil », franchement : vous ne perdez rien à arrêter. Vos soirées n’en perdront pas leur intérêt, et au moins, vous serez sûr de ne pas mettre quelqu’un mal à l’aise. Et ça, ça n’a pas de prix.
Sinon, sachez que toucher sans consentement (par surprise, contrainte, force menace) les zones telles que la bouche, les seins, les fesses, le sexe et l’entre-jambe, c’est commettre une agression sexuelle. On apprend aux enfants à respecter l’« espace vital » des gens, c’est-à-dire les différentes strates de proximité avec les gens, en tant qu’adulte continuons à le respecter. Et comprenons qu’être trop proche de quelqu’un, c’est comme un mode de prédation. En société, gardons nos distances (déjà ça limite la transmission de germes et bactéries – Covida encore toi) si on se connaît mal ou peu, restons à au moins un mètre de distance.
Les relations sexuelles
Ensuite : les relations sexuelles (là, on entre dans le dur du sujet, les relations sexuelles non-consenties c’est du viol, le viol est un crime). Bien qu’il soit très peu puni en France, il est important d’utiliser les « bons mots ».
Avant de vous demander si vous avez déjà violé quelqu’un (certaines questions existentielles sont difficiles à se poser), demandez-vous déjà si :
- Tu as déjà remarqué qu’un.e de tes partenaires était presqu’immobile, passif-ve, absent-e, bizarrement silencieux-se ?
- Tu as l’habitude de baiser bourré, enfin surtout avec des gens pas mal bourrés ?
- Pour toi, dire faiblement « non », c’est surtout qu’on a envie que l’autre insiste ?
- Est-ce que tu as déjà eu un.e partenaire qui se barre avant que tu te réveilles ? Est-ce que c’est arrivé plusieurs fois ?
- Est-ce qu’après une baise, t’as déjà un.e partenaire qui a subitement arrêté de te parler, n’as plus répondu à tes messages, a arrêté de te follow, t’évite ?
- Est-ce que tu as déjà couché avec quelqu’un mais tu sais pas qui c’est car ça s’est fait « comme ça » dans le noir, ivre, etc. ?
- Est-ce qu’un.e partenaire est déjà parti.e après un rapport matinal sans trop d’explications ?
- Est-ce que brusquement un gars a été nexté de ta bande de potes ?
- Est-ce que brusquement une ou plusieurs personnes sont parties de votre bande sans explication ?
- Est-ce qu’il y a un charro parmi vous ?
Voilà, tu gardes les réponses pour toi, ce qui est important c’est de se remettre en question et de ne plus reproduire des comportements inacceptables. Pas de te répandre en excuses privées ou publiques. Mais d’initier un changement chez toi et avec un peu de chance chez les personnes autour de toi.
Prends le temps de t’intéresser
Du reste, regardons les chiffres du chapitre violences sexuelles du bilan statistique insécurité et délinquance de 2020 qui fait état de 294 000 personnes majeures victimes de violences sexuelles (viols, tentatives de viol et attouchements sexuels cumulés) par an pour la période 2016-2018 :
- dans 83% des cas, la victime ne porte pas plainte ;
- dans 81% des cas, la victime est une femme ;
- dans 39% des cas, la victime a entre 18 ans et 29 ans ;
- dans 45% des cas, il s’agit de viol ou de tentative de viol (c’est-à-dire de pénétration – quel que-soit l’organe/l’objet pénétrant) ;
- dans 35% des cas, l’auteur appartient à la famille de la victime ;
- dans 28% des cas, l’auteur est le conjoint ou l’ex-conjoint.
Ce qui veut dire que les femmes ont plus de raisons d’avoir peur de leurs proches. Voilà qui n’est pas bon pour le moral des Français.es ! Mais prenons le chemin inverse, avançons à reculons et remettons en cause nos pratiques ; ouvrons le débat.
Par exemple, se réveiller avec une fellation, c’est un « fantasme » relativement commun. Un truc « normal » qui, de plus, est beaucoup véhiculé dans le porno (et même pas besoin d’aller dans le porno hard). Pourtant, combien de copines à vous se sont déjà réveillées avec les doigts d’un pote ou d’un presqu’inconnu dans la culotte ? Ou la langue ? On parle bien dans ce cas d’une personne connue. D’un « non évènement » aux yeux de la personne qui fait le geste, presque rien. Alors que ça peut durablement marquer, briser la confiance, se sentir sale, dégueu, violé.e, etc.
Et sur la simple motivation d’un gémissement nocturne ? D’une attitude « chaude » dans le sommeil ? De main vaguement baladeuse en plein sommeil paradoxal ? Allons donc, même si tu ne pensais pas « faire de mal », tu te doutes bien que cette pote qui te fait confiance pour dormir sera ravie de ne pas être agressée sexuellement ? Prends le temps de t’intéresser, demande à tes amies si elles ont déjà vécu ce genre de choses, comment elles se sont senties si elles veulent bien en parler.