En cette journée de célébration de ce qui suscite la peur, on revient dans cet article sur cette émotion souvent évitée. En effet, elle peut notamment se répercuter sur des sujets ou personnes, parfois de façon injuste. Par effet ricochet, cela peut donner lieu à des comportements qui nuisent à des rapports humains sereins. Alors d’où vient-elle ? Dans quelle mesure est-elle utile ? Et comment l’apprivoiser ? C’est ce que nous allons voir…
En bref
La peur, qu’elle vienne des drogues, de l’inconnu ou de l’autre, n’est qu’une émotion, un signal pour identifier nos limites et besoins. Souvent, nos croyances transforment cette émotion en comportements injustes ou stigmatisants. Plutôt que de rejeter ou juger les personnes ou situations qui nous effraient, mieux vaut s’informer, écouter et se mettre à la place de l’autre. Ce rappel simple permet de favoriser des rapports humains plus sereins et inclusifs tout en déconstruisant les idées reçues sur les drogues, la consommation et les peurs collectives. En bref : comprendre pour agir, pas pour condamner.
Halloweed
Aujourd’hui, c’est Halloween, ou plutôt Samhain, une fête folklorique celtique qui signifie « fin de l’été » et qui vise, à l’origine, à honorer les morts, notamment à travers divers rituels.
La croyance celtique à l’origine de cette célébration veut que la nuit du 31 octobre, les esprits reviennent sur Terre puisque la frontière entre le monde des vivants et celui des morts s’affine.
Un des symboles les plus connus est la citrouille en guise de lumière. Il est issu de la légende irlandaise de Jack-o’-lantern, décrivant l’histoire d’un homme alcoolique qui aurait tenté le diable à plusieurs reprises et aurait été condamné à errer dans l’obscurité avec une lanterne faite d’un navet.
Ces traditions mettent à l’honneur la mort, souvent associée à des représentations, émotions et manifestations négatives, et tendent à l’envisager de façon festive et joyeuse.
C’est donc une occasion de repenser ce qui est considéré comme triste, rebutant ou dangereux, comme quelque chose pouvant être plaisant, attractif ou anodin.
Et si les émotions, y compris la peur, étaient des alliés, voire une force ? Et si les drogues n’étaient pas seulement définies par des produits illégaux, ayant pour unique fonction l’autodestruction ? Et si les usager·es qui en consomment n’étaient pas que des personnes à exclure ou à fuir ?
S(angry)a
Les émotions désignent un état psychologique, jouant un rôle de signal nous permettant d’identifier nos envies, besoins et limites.
Elles sont associées à des ressentis physiques, qui sont propres à chacun.e.
Ces signaux indiquent lorsqu’une situation est plaisante, désagréable ou neutre, et déterminent nos comportements.
La peur fait partie des cinq émotions primaires et vient signaler un danger, réel ou imaginaire.
Elle peut se manifester par un état de stress (accélération du rythme cardiaque, respiration saccadée, frissons, tremblements, tensions musculaires).
Le comportement associé peut être de se défendre (attaquer en agressant, par exemple) ou la fuite.
Mais alors, si la peur est utile comme les autres émotions, pourquoi les comportements qui s’ensuivent peuvent ne pas être adaptés ?
Drogula
La peur peut donc surgir face à une menace supposée, et non réelle.
Elle peut être réellement vécue comme telle sur le plan émotionnel, mais réveiller une sensation de danger qui viendrait d’ailleurs.
Une peur archaïque projetée sur un événement présent qui mériterait d’être replacée dans son contexte pour éviter qu’en découlent des comportements qui ne soient donc que transposés d’une situation à une autre, souvent sans justification actuelle.
Ce phénomène de projection se produit pour confirmer la croyance originelle.
Autrement dit : une croyance donne lieu à une peur qui donne lieu à un comportement.
La croyance est la fondation (survenue dans un contexte précis), la peur est l’émotion réellement ressentie et le comportement qui s’ensuit, s’il est dicté par cette émotion, peut venir confirmer la croyance initiale.
C’est l’effet de prophétie autoréalisatrice.
Et c’est d’ailleurs ce que l’on observe souvent en ce qui concerne les drogues.
Elles suscitent la peur pour ce qu’elles symbolisent ou représentent à échelle individuelle comme dans l’inconscient collectif, et donnent lieu à des réactions de rejet de façon presque instinctive.
De nombreux facteurs peuvent initier des croyances associant l’instinct au rejet des drogues, mais l’inconnu peut en être un commun.
D’où l’intérêt de s’informer, de se familiariser avec des sujets méconnus avant de s’en faire une opinion réductrice.
En effet, la plupart des usages de drogues ne sont pas des rapports addictifs et pourtant, de nombreuses fausses croyances constituent le socle de peurs associées à ces substances.
Ce qui vient dicter des actions pouvant mettre à mal diverses utilisations de ces dernières, avec un objectif de plaisir ou thérapeutique, par exemple.
L’enfer, c’est les autres
Il en va de même en ce qui concerne les usager.es de ces substances.
Eh oui, exclure ou fuir les personnes qui consomment ce qui vient susciter la peur en soi, ça s’appelle la stigmatisation, et c’est un problème central dans notre société.
Et ce, pour plusieurs raisons, notamment : l’égoïsme nourri au détriment de qualités humaines telles que l’empathie (comprendre l’autre sans ressentir les mêmes choses), le fossé qui se creuse entre chacun.e et empêche des évolutions communes, l’hypocrisie lorsque l’acceptation existe pour certains types de personnes ou contextes et pas pour d’autres.
L’idée est principalement d’intégrer que les jugements sont fondés sur une projection d’idées reçues sur l’Autre, qui peuvent conduire à l’objectifier, le déshumaniser, et ainsi générer d’importantes hiérarchisations et inégalités.
D’où l’importance d’interroger l’intention derrière l’action, en veillant à ce que la peur d’un danger supposé ne vienne pas dicter des comportements qui iraient à l’encontre de l’intégrité, de soi et/ou d’autrui.
Parce que là où tu vois un “6”, je vois un “9” ; parce que là où il considère la mort comme un fardeau, lui la considère comme une bénédiction ; parce que là où elle voit des objets destructeurs, celle-ci les voit comme des béquilles ; parce que là où iel voit des personnes à condamner, iel voit des humains avec qui partager.