Des échantillons de drogue préparés et secs dans leur racks. Druglab / Keps
Des échantillons de drogue préparés et secs dans leur racks. Druglab / Keps

Drug Lab et analyse de drogues, comment ça marche ?

Publié le 27 mai 2024 par Maxime

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Cet article parle de : #analyse-de-drogues-drugchecking

On a de cesse de vanter les mérites de l’analyse de drogue à Marseille ou ailleurs, mais concrètement, comment ça marche ? Dans cet article, on va vous raconter ce qu’il advient de votre échantillon de drogue entre la collecte et la publication des résultats sur le site Internet. Précisons que l’analyse de drogue est un service gratuit et anonyme.

Entretien de collecte 

Avant toute chose, il y a l’entretien de collecte. Un moment privilégié en duo ou en trio avec une personne du réseau des collecteurs pour discuter du produit à analyser. Aucune question n’est vraiment obligatoire et l’usager ou l’usagère est libre de nous dire ce qu’il ou elle souhaite mais aussi de taire ce qu’il ou elle souhaite. Les habitudes de consommations, les effets ressentis, les trucs bizarres, les informations générales, etc. Ce moment est précieux pour l’usager ainsi que pour le professionnel. C’est là que peuvent s’échanger de précieuses informations, que l’on peut questionner ses usages, ses connaissances ou découvrir du matériel ou des services qui peuvent nous être utiles. Durant ce temps d’échange, l’usager est invité à mettre une fraction de son produit dans un tube à centrifuger (mais nous ne centrifugeons pas). 

À titre indicatif : pour les poudres, il faut environ 10 mg pour pouvoir faire une analyse quantitative (être en mesure de dire quelles substances et en quelle quantité composent l’échantillon). Concernant les taz, on préfère les recevoir en entier afin de pouvoir les photographier et être en mesure d’évaluer la quantité totale de MDMA contenue dans le comprimé ; il est néanmoins possible de faire une analyse quantitative à partir de 10 mg de poudre de comprimé. Pour les buvards et les substances microdosées, on prend une unité entière.

La paillasse du Druglab sous sa hotte aspirante (évacuation des vapeurs toxique de méthanol).
La paillasse du Druglab sous sa hotte aspirante (évacuation des vapeurs toxique de méthanol).

L’équipe de Drug Lab est actuellement composée d’une docteure en pharmacie, d’une docteure en écologie et d’une technicienne de laboratoire alternante. 

Réseau de partenaires

On en profite pour préciser que si nous sommes basés à Marseille, les services du Drug Lab s’étendent à toute la région Paca-Corse. Grâce à un réseau de structures qui font les collectes et nous les envoient pour analyse. Évidemment, cela ajoute quelques jours pour que l’échantillon parvienne jusqu’au labo. Grâce au partenaire Not For Human nous analysons également des échantillons qui viennent de tout le territoire national.

Par ailleurs, d’autres dispositifs d’analyses de drogues existent et se rassemblent en réseau  en France (Analyse ton prod) mais aussi en Europe (Tedi – Trans European Drug Information), pour avoir plus d’impact politique, connaître les tendances des produits qui circulent afin d’adapter les stratégies de réduction des risques, faire du repérage précoce ou encore partager et comparer les résultats, et perfectionner les différentes méthodes d’analyse. 

Pour trouver un dispositif d’analyse près de chez toi, tu peux consulter la carte interactive de Techno Plus issue de l’article « Où faire analyser ses prods ? »

Voir en plein écran

Préparation de l’échantillon 

Sur un jour d’ouverture du laboratoire et d’analyse (l’équipe du laboratoire fait d’autres choses et les sessions d’analyses ne sont pas forcément quotidiennes), on récupère donc l’échantillon accompagné de son formulaire, du code qui le réfère dans le site du Drug Lab, et c’est parti pour l’analyse en HPLC (Chromatographie liquide haute performance).

💊 S’il s’agit d’un taz (ou d’un comprimé quelconque), il est pris en photo recto/verso ; mesuré au pied à coulisse en long, en large et en travers ; et pesé à la balance de précision. Puis il est réduit en poudre. 

📦 S’il s’agit d’un carton/buvard, il est pris en photo recto/verso. 

❄️ S’il s’agit de poudre, on saute cette étape.  

 

L'équipement du Druglab.
La balance de précision et les fioles qui servent à préparer les échantillons.

Une fois qu’on a une poudre homogène, on place une fiole sur la balance de précision. On met environ 10 mg de poudre dans la fiole et on reporte très précisément le grammage dans l’ordinateur. Ensuite, on remplit cette fiole de 25 ml (ni plus ni moins) de méthanol. C’est un solvant qui vise à dissoudre le produit. Ensuite, la fiole passe 3 minutes dans un bain à ultrason. Cela assure que le produit soit correctement dilué. Après cette étape, on prélève 2 ml, filtrés, qu’on vient placer dans une fiole spéciale qui rentre dans la tour de la machine. On jette les 23 ml restants dans la poubelle (une grosse bouteille pleine de méthanol) et le reliquat sec de l’échantillon est conservé dans une armoire sécurisée. 

Les buvards sont placés tels quels dans une petite fiole avec 10 ml de méthanol puis, jusqu’à ce que la mini fiole (un « vial » pour les accro au Scrabble) aille dans le rack de la machine, le processus est le même. On place la fiole dans les racks de la machine, après quoi on lance la séquence d’analyse. 

 

 
 
 
 
 
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L’analyse 

L’échantillon passe environ 12 minutes dans la machine, à la suite de quoi l’ordinateur affiche une courbe. Une courbe dont les pics et le spectre d’absorption sont caractéristiques de différentes drogues (le spectre d’absorption est déterminé par la quantité de lumière absorbée par un composé, en fonction de la longueur d’onde). Le personnel du Drug Lab interprète cette courbe, ce qui donne un résultat. Avec une ou plusieurs molécules, les résultats sont saisis sur le site, des conseils de réduction des risques ou des précautions spécifiques peuvent être ajoutés à la fiche de résultat. 

L’HPLC nécessite d’être calibrée par l’équipe à partir de standards des molécules pures fournies par des laboratoires pharmaceutiques. Pour chaque produit, des échantillons sont préparés avec différentes concentrations afin de monitorer les différentes courbes et ce qu’elles signifient. Il peut arriver que le spectre d’absorption ne corresponde pas à une molécule déjà analysée au laboratoire, dans ce cas-là, nous faisons appel à un réseau de labos partenaires (laboratoire de toxicologie et pharmacocinétique de la Timone ou résonance magnétique nucléaire de l’université de Bretagne occidentale) ou le dispositif SINTES de l’OFDT.

Un protocole de validation croisée des résultats d’analyse quantitative a été mis en place avec le laboratoire de pharmacocinétique et de toxicologie de l’AP-HM Timone depuis 2021, encadré par une convention de partenariat. Ce laboratoire est aussi un support pour l’analyse complémentaire et l’identification de substances en cas de résultats d’analyse incertains ou incomplets, notamment sur les NPS. Cela permet d’augmenter chaque année la liste des substances identifiables.

La tour de l'HPLC (sous sa hotte).
La tour de l’HPLC (sous sa hotte).

Aussi, à titre informatif, les substance analysables actuellement détectables au laboratoire sont :  1CP-LSD, 1P-LSD, 1V-LSD, 2-CMC, 2-MMC, 2C-B, 2cbfly, 2C-D, 2C-E, 2F-DCK, 2-OXO-PCE, 3 chloro NN dimethyl anilline, 3 MEC, 4 MEC, 3-CMC, 3MePCP, 3FMC, 3-MMC, 3,4 DMMC, 4 CMC, 4-HO-MET, 4-FMP, 4-MMC, 5-MAPB, 5-DBFPV, 5-MEO-DMT, 6 acetyl codeine, 6-APB, 6 MAM, 8 chloro theophyllinate, alpha php, alphamethylbenzylamine, Alprazolam, Amphetamine, BMK, Bromonordiazepam, bromazepam, cafeine, chloroquine, cocaïne, codéine, créatine, diazépam, Dipentylone, diphénydramine, DMT, DOC, ethcatinone, HDEP-28, Eutylone, fentanyl, Fluoxetine, heroine, hydroxyzine, Iso LSD, isopropylphénidate, kétamine, lévamisole, lidocaÏne, lorazépam, loxapine, LSD , MDMA, MDPV, MDP2P ethylglycidate, MTTA Mephtetramine,  méthamphétamine, morphine, MXPr, NEP, noscapine, OH-PCP, oxycodone, paracétamol, phénacétine, procaïne, prométhazine, Seresta, tadalafil, tétracaïne, Théralène alimémazine, Tramadol, zopiclone. 

Les substances ci-après sont quantifiables : 2CB, 3-MMC, amphétamines, caféine, cocaïne, héroïne, Iso LSD, kétamine, lévamisole, lidocaïne, LSD, MDMA, paracétamol, phénacétine.

Une fois que le résultat est entré sur le site du Drug Lab, il est consultable par toutes et tous. Il arrive également dans la base de données de Knowdrugs. On ne le rappellera jamais assez : un résultat d’analyse est valable pour un échantillon précis. Les captures d’écran ne doivent pas être un argument de vente !

 

Méfiez vous des gens qui exposent tel ou tel résultat en vous garantissant que leur produit est le meilleur. 

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