Le personnage incarné par Léonardo Dicaprio joue au basket visiblement sous influence de drogue (il n'a vraiment pas bonne mine). Image issue du film "BasketBall Diaries"réalisé par Scott Kalvert.

Basketball Diaries – Garder le lien malgré tout

Publié le 3 mai 2023 par Lisa

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Cet article parle de : #addiction #culture #films #histoires-vraies #drama

Basketball Diaries, un film américain sorti en 1995, réalisé par Scott Kalvert avec Leonardo DiCaprio et Mark Wahlberg.

On suit Jim Carroll (qui est l’auteur du livre autobiographique éponyme dont le film est adapté), un jeune homme en manque de repères qui vit avec sa mère dans un milieu plutôt chiche, au bas de la classe moyenne. Il passe ses journées avec sa bande de copains à jouer à la bagarre entre deux matchs ou entraînements. Un soir, un copain l’invite chez deux copines des beaux quartiers bien décidées à voir le loup et il goûte pour la première fois à une drogue stimulante en poudre non nommée (dans un contexte sexuel d’ailleurs). De là, c’est la grande valse des consos de plus en plus glauques et dangereuses avec plusieurs ruptures, qui l’isolent de plus en plus.

Que ce soit l’affiche, la bandeannonce ou les premières minutes du film, tout rappelle la direction artistique des messages de prévention de l’association américaine « A Drug Free World » (ou « Non à la drogue, oui à la vie » en français). Et l’heure et demie que dure le film (par ailleurs assez rapide à regarder, on ne s’ennuie pas devant) ne fait que confirmer cette désagréable sensation. Mais il faut remettre le film dans un contexte : il adapte un livre autobiographique publié en 1978 qui relate des faits arrivés dans les années 1960 (presque la même période que celle de L’Herbe bleue, on vous invite à regarder notre vidéo à ce sujet pour mieux saisir l’époque). Le film est donc orienté et décrit une situation particulièrement alarmante et tirée de faits réels dans le but de « prévenir ». Sauf qu’on le sait, la prévention par la peur, ça ne marche pas vraiment. Par ailleurs, la French Connection était encore particulièrement active dans les années 60 et arrosait à toute berzingue les USA d’héroïne.

Coupe-faim, somnifères et antidépresseurs

Le film est sorti en 1995, l’année de la mise sur le marché de l’Oxycontin®. Le médicament est à l’origine de la grande crise des opioïdes qui dure depuis. La question des médicaments antidouleur n’est donc pas visible à l’écran, mais on les voit effectivement gober des pilules, entre les coupe-faim amphétaminiques, les somnifères assommants et les antidépresseurs, il y a de toute manière de quoi faire dans les armoires à pharmacie des desperates housewifes américaines. 

On y dépeint une escalade de consommation assez rapide, ce qui peut arriver bien sûr. Mais fumer un pétard ne veut pas dire que vous serez dans le caniveau six semaines plus tard. D’ailleurs, le film prend le temps de ne pas nous donner d’indications temporelles. On entretient un flou (que le livre corrige sûrement) qui, à force d’ellipse, peut accélérer la glissade. Sinon, la fin (spoiler alert) qui mène Jim en prison pour six mois, un lieu où il se sèvre « à la dure » malgré les codétenus violeurs et les matons maltraitants, nous fait tiquer. 

Alors, est-ce qu’on y trouve une démarche de réduction des risques ? Non ! D’une part, parce que l’époque ne se prêtait pas à la diffusion de messages adaptés, et aussi car le personnage adolescent vit dans un monde dans lequel il ne peut faire confiance à aucun adulte. Le film présente Jim comme un zombie écervelé soumis au bon vouloir de LA DROOOGUE mais nous montre une galerie de personnages adultes nauséabonds, incapables de focus sur l’accompagnement de ce jeune. Il ne manque pas de volonté, l’addiction n’est d’ailleurs pas qu’une question de volonté.

Mauvais potes qui ne sont pas aidants

En première ligne, il y a le coach sportif abusif, la maman ultra pieuse qui, à bout de nerfs, préfère prier Dieu pour qu’il vienne en aide à son gamin qu’elle a foutu à la porte, et enfin les mauvais potes qui ne sont pas aidants même si leurs situations familiales ne nous sont pas montrées. D’ailleurs à un moment, Jim retourne chez les sœurs bourgeoises qui l’ont initié et elles semblent ne pas avoir de problèmes et maîtriser leur consommation. Un climat familial stable, des moyens financiers et un lieu de vie confortable et sécurisant sont autant de filets qui peuvent retenir des ados déjantés de partir en cacahouète.

On aura de cesse de le dire, l’addiction (surtout une plongée aussi rapide) peut être le symptôme visible d’un traumatisme, d’angoisses, d’un profond mal-être, d’une dépression ou de solitude. Le lien (le garder, le créer) est indispensable, même s’il est difficile de supporter les différents mécanismes que les dépendances mettent en place. 

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