Victor Belmondo, Théo Christine,Lou Lampros et Hélyos Johnson dans le film Vivre, mourir renaître de Gaël Morel
Victor Belmondo, Théo Christine,Lou Lampros et Hélyos Johnson dans le film Vivre, mourir renaître de Gaël Morel

Vivre, mourir, renaître – l’anti Nuits fauves

Publié le 2 octobre 2024 par Maxime

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Cet article parle de : #sante-sexuelle #sexualite #vih #culture #fictions #films

Peut-on encore parler du sida en 2024 sans rabâcher ce qui a maintes et maintes fois été déjà dit ? En proposant une histoire entre la période où les malades étaient des condamné·es à mort et l’apparition de trithérapies efficaces permettant une vie (presque) normale ; le long métrage semble nous dire que oui. 

1990, un hangar autour de Paris, une teuf tekno. Deux amoureux sortent se rouler des palots mais un gars chelou les observe. Malgré un premier déplacement, le gars est toujours là. Il leur propose des ecstas, et leur donne en leur faisant un French Kiss chacun. C’est une scène muette. Ensuite, la drogue fait son effet.Une ellipse plus tard, on les suit sur le chemin du retour : les tourtereaux marchent le long d’un canal. Samy profite de ce moment pour expliquer à Emma, avec qui il est en couple, qu’il aime aussi les garçons. Emma n’a pas de problème avec ça, ça l’excite même un peu, dit-elle. 

Deux relations d’amour autour du même garçon


Une nouvelle ellipse nous fait avancer de plusieurs années sans qu’on ne sache combien et nous fait découvrir Cyril, le troisième membre de ce qui constitue le cœur de l’histoire. Pas vraiment un triangle amoureux ni tout à fait une amitié sans intimité : deux relations d’amour autour du même garçon. Cyril est photographe, homosexuel, séropositif et son labo photo est sous l’appartement que le jeune couple vient d’acquérir. Assez rapidement, les deux garçons vont se rapprocher puis en venir aux lèvres. Au moment de faire le sexe, Cyril met un stop : plus de capotes = pas de sexe et c’est non négociable. Samy se veut rassurant, c’est pas si grave… Cyril révèle sa séropositivité, son amant remarque qu’il « n’a pas l’air malade ». Ne se laissant pas démonter, les deux garçons courent jusqu’au distributeur de capotes le plus proche au cours d’une jolie séquence 100% cinéma. Après ça, l’affaire est faite. Cyril s’intègre naturellement à la vie du couple même si la romance des garçons se fait dans le dos d’Emma jusqu’à ce qu’elle les surprenne.


Un jour, Samy fait ce qu’il croit être une crise cardiaque. À la suite d’une prise de sang qui montre des signes d’infection, on l’encourage à faire le test. L’annonce arrive vite, il est séropositif, la maladie sida s’est déjà déclarée. La famille est soumise au dépistage, Emma est contaminée mais la maladie n’est pas encore déclarée. Leur fils Nathan est séronégatif. Alors que la santé de Samy se dégrade, le trio cherche un nouvel équilibre. Des symptômes de plus en plus visibles. Lors d’un voyage en Italie, le film opère un bond de 5 ans. Samy n’est plus là mais Cyril et Emma s’occupent en bons amis de Nathan. Un jour, le docteur annonce à Emma qu’elle est en bonne santé, que sa charge virale est indétectable. Que faire quand la mort n’est plus sur nos côtes ? 

Loin du nihilisme des Nuits fauves

Le réalisateur a fait appel au même affichiste pour un hommage remarqué
Le réalisateur a fait appel au même affichiste pour un hommage remarqué


L’hommage assumé (l’affiche, le nom des personnages) n’empêche pas la transgression : le film se pose comme un anti Nuits fauves. Les personnages se parlent, s’aiment, veulent vivre, s’apportent du soin, de la gentillesse et de l’affection, sont soudés, etc. On est très loin du nihilisme du livre de Cyril Collard et des crises de nerfs de la jeune Laura et des dizaines de pages de messages laissés sur le répondeur du héros des Nuits fauves. D’ailleurs, le répondeur téléphonique est l’occasion d’une très jolie scène entre Victor Belmondo et Théo Christine.
Le film est empreint de douceur, malgré des dialogues qui donnent parfois franchement l’impression d’être récités. Ceci dit, les comédiens sont tout en retenue. Une sobriété bienvenue qui contraste fortement avec la lourdeur de la musique. Les scènes mélodramatiques sont vraiment plombées par du piano et du violon en mode TRISTE. 

On aime aussi les professionnel·les de santé qui sont présentés : compréhensifs, doux, didactiques et respectueux. Ce que tous et toutes devraient être dans un monde idéal. Hélas, les violences en milieu hospitalier sont légion, et même si la question du VIH est traitée avec bien plus de bienveillance qu’avant, les listes de docteurs safes continuent de s’échanger dans les groupes communautaires (qu’il s’agisse de VIH, de transitions, de troubles psy ou de conduites addictives, par exemple). À ce titre, la réaction de la docteure à laquelle Cyril confie sa lassitude d’être un cobaye de l’AZT fait preuve d’une grande humanité.

Sorti le mercredi 25 septembre, « Vivre, mourir, renaître », réalisé par Gaël Morel, dure 100 minutes.

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