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Inclure la notion de plaisir quand on parle de drogue : pourquoi c’est si compliqué ?

Publié le 6 novembre 2023 par Lisa

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Cet article parle de : #politique-des-drogues-drogues-illegales #sante #fete

Si la bannière qui s’étend sur nos stands en soirée indique « fêtes, risques et plaisirs », ce n’est pas juste pour faire joli. La notion de plaisir est primordiale dans l’usage de produits psychoactifs. Il serait mensonger de ne pas la mentionner. Pourtant, elle est quasi absente des discours dominant sur la drogue, pourquoi ?

Que les mécanismes du plaisir puissent conduire à l’addiction, ça, ça semble évident. Paracelse disait « Tout est poison, rien n’est poison : c’est la dose qui fait le poison ». La chimie du cerveau (et notamment la circulation des neurotransmetteurs) observe des schémas de libération en fonction de stimulus précis. Par exemple : la peur libère l’adrénaline qui accélère le rythme cardiaque, aiguise les sens et permet de réagir en dépit de la raison face à un danger. Un câlin libère de l’ocytocine, fait se sentir bien, apaise et soulage les angoisses, ne serait-ce que brièvement. Les produits psychoactifs court-circuitent ces schémas et permettent de disposer « sur commande » de ces mécanismes. Mais ces dérèglements ont un prix : une réserve vidée de sérotonine, par exemple, met jusqu’à 6 semaines à se recharger !

Pourtant les discours dominants et considérés comme légitimes (ceux qui n’émanent que rarement des consommateur.ices) sur la drogue excluent quasi systématiquement la notion de plaisir : « L’expérience de la drogue ne peut être entendue publiquement que si elle va  dans le sens de la norme : si elle est sordide, si elle est risquée (maladies infectieuses, dépendance, effets indésirables, conséquences psychiques, sociales), si elle s’achève par la déchéance ou le rétablissement dans le droit chemin, l’abstinence. Les autres facettes de l’expérience, celles qui viennent à l’encontre de ces normes, ne peuvent pas faire l’objet d’un discours sérieux sur la drogue, d’un discours d’autorité tels que ceux portés par les médias, la recherche ou le pouvoir politique », expliquent les collègues d’ASUD. 

Plaisirs autorisés vs plaisirs répréhensibles

Plusieurs raisons sont évoquées : le tabou qui subsiste à parler de plaisir quand on parle de drogue. Chaque société a ses normes légales et morales, dans la nôtre, consommer de la drogue enfreint les deux. Les normes morales délimitent clairement la frontière entre plaisirs autorisés et plaisirs répréhensibles, ainsi : « la simple évocation de ce plaisir est absolument écœurante, puisque c’est contre les lois et à l’encontre des règles morales établies que ce plaisir est tiré ». Une autre explication serait le caractère insaisissable de la notion de plaisir. En effet, le plaisir est une notion difficilement objectivable et quantifiable. De même, sa description ne se prête guère à l’usage de termes précis et scientifiques, ce qui l’exclue souvent des discours d’autorité (de recherche, politiques, académiques, médiatiques, etc.). Finalement, le plaisir est parfois perçu comme une problématique sans réels enjeux : à quoi bon s’y intéresser si l’usage n’est pas considéré comme problématique ? C’est à déplorer puisque cela nous fait passer complètement à côté d’une compréhension plus profonde de l’usage et de ce qui peut le motiver. 

Bien sûr, l’usage et la dépendance qui peut en découler peuvent être de réelles sources de souffrance et de détresse ! Pour autant, prendre en compte la notion de plaisir permet d’avoir une vision plus nuancée et de diffuser plus largement un discours de réduction des risques.

 

Pour lire l’article complet rédigé par ASUD, c’est ici : http://www.asud.org/2013/02/22/peut-on-serieusement-parler-de-drogues-sans-parler-de-plaisir/ 

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