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Politique française des drogues : que dit la loi et pourquoi ça ne marche pas ?

Publié le 13 mars 2023 par Lisa

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Cet article parle de : #drogues-illegales

« Ne rien concéder. » Interrogé par La Provence, Gérald Darmanin a martelé que la drogue constituait un fléau qu’il fallait éradiquer. À ce titre, il estime qu’aucune concession ne doit être faite, y compris en matière de cannabis. « Légaliser serait une lâcheté », assène-t-il. En France, depuis les années 1970, le cadre légal en matière de drogue est strictement prohibitif. Mais que dit la loi précisément ? Et pourquoi ça ne fonctionne pas ? 

La politique française en matière de drogue repose sur la loi du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et la répression du trafic et de l’usage illicite de substances vénéneuses. Cette loi incrimine, pour la première fois en France, l’usage simple de substances classées comme stupéfiants. Elle sanctionne également la production, la vente ou la cession, et l’organisation de la production ou de la cession de stupéfiants.

Elle met en place un double système de mesures coercitives, où deux types de réponses légales sont offertes par le magistrat à l’usager d’une des substances classées comme stupéfiants : réponse pénale (répressive), ou réponse médicale (sanitaire). À ce titre, elle considère l’usager simple de stupéfiants à la fois comme un malade et comme un délinquant.

Alors, pourquoi ça ne fonctionne pas ?
Pour commencer, la répression est inefficace. Cinquante ans de répression ont fait de la France un des pays les plus consommateurs d’Europe. Force est de constater que l’interdit pénal ne dissuade pas l’usage : malgré un nombre toujours plus élevé d’interpellations pour infraction à la législation sur les stupéfiants (essentiellement pour usage simple et non trafic), la consommation moyenne ne recule pas. De la même manière, il n’a pas d’impact significatif sur les trafics, qui s’adaptent constamment, ni sur le prix des consommations, qui reste relativement stable. 

Inefficace, voire contre-productif

Deuxièmement, la répression est extrêmement coûteuse. Cette politique a un coût pour les finances publiques : un milliard d’euros alloué aux forces de l’ordre en 2018, deux fois plus qu’en 2012 et toujours pas plus d’efficacité. Si on observe le coût social du cannabis en France, il apparaît même que l’implémentation de la loi coûte plus cher à la collectivité que le phénomène qu’elle cherche à combattre.

Ensuite, la répression est vectrice d’injustices sociales. Alors que la loi de 1970 s’applique à tous les Français, seules certaines catégories d’individus seraient concernées par son implémentation. Sans grande surprise, les probabilités d’interpellation et de contrôle ne sont pas les mêmes pour tout le monde et les minorités ethniques, entre autres, semblent pâtir particulièrement de ce dispositif répressif.

Finalement, la répression est dangereuse. En effet, l’interdiction totale et les sanctions associées précarisent, isolent, stigmatisent et éloignent du soin les consommateur.ices. En 2020, la mise en place de l’amende forfaitaire délictuelle pour usage de stupéfiant ne fait que renforcer ce principe répressif, éloignant encore un peu davantage les consommateur.rices de la réduction des risques. De même, forcer des personnes en situation d’addiction à se sevrer n’est pas efficace, voire est contre-productif : ces méthodes sont vectrices de traumatismes pour des publics déjà vulnérables.

Alors, à quand une véritable politique de santé publique qui informe sans culpabiliser ? Sortons de l’hypocrisie : la consommation existe et a toujours existé ! Il serait grand temps d’en prendre acte et d’envisager d’autres réponses, qui permettraient de contrôler les produits, leur vente et d’être en mesure de mettre en place des actions de prévention efficaces.

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