
Violences sexuelles sous GHB, agressions dans des milieux queer ou activistes, rapports flous sous MDMA : l’ampleur du problème est connue. Mais que fait-on une fois que ça arrive ? Alors que les institutions peinent à répondre, des collectifs s’organisent pour poser d’autres bases. Non pas pour faire « à la place de », mais pour faire autrement.
Des faits, trop souvent tus
Dans les contextes de fête, de milieux DIY, queer ou activistes, les violences sexuelles prennent des formes variées et parfois difficilement nommables : toucher non consenti sous produit, pressions dans les plans cul collectifs, actes commis sous emprise, black–out, silences pesants au réveil.
Les dispositifs classiques (dépôt de plainte, prise en charge hospitalière) sont souvent inadaptés : délais, jugement, exposition au trauma, peur de ne pas être cru·e… Face à cela, certain·es choisissent le silence. D’autres cherchent d’autres formes de réponse.
Politiser la réponse, sans reproduire la violence
Depuis plus d’une décennie, des pratiques de justice transformatrice émergent, venues notamment des communautés afro-féministes, queer et anarchistes. L’enjeu n’est pas de « punir » à la place de l’État, mais de construire des manières collectives, situées et responsables d’aborder les faits, d’écouter les personnes touchées et de responsabiliser les auteurs présumés.
Cela peut passer par :
- Des cercles de soutien pour les victimes et survivant·es ;
- Des temps d’auto-réflexion encadrés pour les auteur·ices ;
- Des espaces de médiation ou de rupture collective temporaire ;
- Des engagements concrets (prise en charge psy, mise en retrait d’un projet, réparation symbolique ou matérielle…).
Ce que la fête peut apprendre
Des collectifs comme Consentis, Keep Smiling, Plus Belle la Nuit, développent des outils concrets pour les milieux festifs : équipes de veille consentement, espaces de recueil, formations des orgas, chartes d’engagement, protocoles d’action.
Ces démarches sont fragiles, souvent bénévoles, parfois critiquées – mais elles remplissent un vide institutionnel. Elles s’appuient sur l’idée que le soin ne peut pas être séparé du collectif. Qu’il ne suffit pas d’intervenir après-coup, mais qu’il faut créer des conditions où les agressions sont moins probables, et où la parole peut exister.
« Ce n’est pas parfait, mais c’est un début de prise de responsabilité. »
(un participant à une formation)
Pour ne plus choisir entre silence et tribunal
Les jeunes concerné·es par les usages de drogues sont souvent les mêmes que ceux·elles qui vivent des violences genrées. Ils·elles ont besoin d’espaces mixtes, réflexifs, sûrs mais pas aseptisés. D’équipes formées, ancrées, pas surplombantes. Et d’allié·es qui ne détournent pas le regard quand la fête vacille.
Ce n’est pas qu’un sujet de « prévention » ou de « consentement » : c’est une question de justice. Une manière de dire que nos vies méritent mieux que l’alternative entre la honte et la case justice pénale.
Pour aller plus loin :
- Incite! Women of Color Against Violence (2006). The Revolution Will Not Be Funded: Beyond the Non-Profit Industrial Complex
- Consentis. Formations et ressources. https://consentis.org