mélange de bonbons
photo : Karsten Winegeart

Plaisir, addiction, réduction des risques : où tracer la ligne ?

Publié le 24 février 2025 par Romain

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Cet article parle de : #chemsex #podcast

« Le plaisir, c’est la clé pour comprendre l’addiction. »

Qu’on se le dise : si les gens prennent des produits, c’est avant tout pour kiffer. Et pourtant, chaque fois qu’on parle d’addiction, c’est avec des grands discours moralisateurs sur la souffrance, la dépendance, la chute inévitable.

Et si on remettait les pendules à l’heure ? C’est exactement ce qu’on a fait lors de cette table ronde sans filtre, enregistrée dans le cadre de la Biennale des Imaginaires Numériques 2024, en partenariat avec CHRONIQUES.

KEPS, le média qui parle vrai, a donc posé ses valises dans ce festival arty et futuriste pour taper là où ça fait mal : les frontières entre plaisir et addiction, la réduction des risques et le chemsex.

🎧 Écoutez l’épisode ici et faites-vous votre propre avis !

DEUX INTERVENANT·ES, PAS DE LANGUE DE BOIS

Pour cette conversation qui ne mâche pas ses mots, on retrouve Muriel Grégoire, psychiatre addictologue spécialiste du chemsex et des addictions comportementales, et Romain Giraud, technicien expert en réduction des risques, mais aussi rédacteur chez KEPS.

À la modération ? Hugo et Jamal, qui essaient de garder tout ça sous contrôle (bonne chance, les gars).

Muriel, c’est l’anti-morale incarnée. Elle l’annonce direct : « L’addiction, c’est pas qu’une descente aux enfers. Si on veut comprendre pourquoi les gens consomment, faut parler plaisir avant tout. »

Romain, lui, est dans le concret : « La réduction des risques, c’est pas la prévention. On n’est pas là pour dire aux gens d’arrêter, mais pour leur donner les outils pour consommer avec un max de sécurité. »

PLAISIR VS ADDICTION : LA LIMITE EST FLUCTUANTE

🔥 « Si on consomme, c’est parce que ça fait du bien. Le problème, c’est quand ça devient la seule solution. » – Muriel

Là où beaucoup voudraient foutre une frontière nette entre usager récréatif et toxicomane en enfer, Muriel démonte tout. L’addiction, c’est pas binaire.

Elle explique que le plaisir évolue. Ce qui commence comme un kiff peut devenir un besoin, un automatisme, une fuite. « Au début, on consomme pour ressentir quelque chose. Puis parfois, on continue juste pour éviter de ressentir autre chose. »

🔹 Les premières fois : de l’excitation, de la découverte.
🔹 Puis le plaisir diminue. Alors on dose plus, on enchaîne.
🔹 Et à un moment, c’est plus du plaisir, c’est du soulagement.

C’est ce que Muriel appelle le syndrome des chaussures trop serrées (oui, vraiment). « T’as des chaussures trop petites toute la journée, ça fait mal. Le soir, tu les retires et t’as une sensation de ouf. Mais est-ce que c’est vraiment du plaisir ? Ou juste l’absence de douleur ? »

💡 Et là, boum : c’est comme ça que certains basculent.

DOPAMINE, IDENTITÉ ET DÉPENDANCE

🔥 « J’ai arrêté de fumer plein de fois. Mais au fond, je suis une fumeuse qui ne fume pas. » – Une intervention du public

C’est quoi l’addiction, en fait ? Une dépendance biologique ? Psychologique ? Un truc qui fait partie de notre identité ?

Muriel et Romain s’accordent sur un truc : le plaisir, c’est bio. Ça active la dopamine, ce qui nous pousse à recommencer. Mais y’a pas que la chimie.

L’addiction, c’est aussi une question d’identité.

  • « Quand t’as toujours fait la teuf sous prod, arrêter c’est flippant. Qui tu es, sans ça ? » – Romain
  • « Les gens disent pas ‘je fume’, ils disent ‘je suis fumeur’. » – Muriel

💊 Et c’est là que le cerveau nous joue un sale coup. Parce que plus on répète une action, plus elle s’ancre dans qui on est. Et plus il devient difficile d’arrêter sans avoir l’impression de perdre un bout de soi.

PRÉVENTION VS RÉDUCTION DES RISQUES : STOP AUX FANTASMES

🔥 « Dire que la RdR incite à consommer, c’est comme dire que les extincteurs poussent les gens à foutre le feu. » – Romain

C’est l’un des grands malentendus : la réduction des risques n’a rien à voir avec la prévention.

  • La prévention, c’est : « Ne commence pas, c’est dangereux. »
  • La RdR, c’est : « Si tu consommes, fais-le en limitant la casse. »

Muriel enfonce le clou : « Dire ‘la drogue, c’est mal’, ça marche pas. Ce qui marche, c’est donner aux gens les moyens de gérer leurs conso sans se cramer. »

🔥 Un exemple concret ?
Romain sort un briquet et balance son « sketch de la flamme » :

  • Le produit, c’est le carburant.
  • Le contexte, c’est l’oxygène.
  • L’usager, c’est l’étincelle.

💡 La RdR, c’est pas éteindre le feu. C’est apprendre à le maîtriser pour pas se brûler.

KEPS x CHRONIQUES : UNE ALLIANCE POUR DÉCLENCHER DES DÉBATS

Pourquoi KEPS s’est associé à CHRONIQUES pour cette table ronde ? Parce qu’on parle trop peu de plaisir quand on parle de drogues.

🔥 Parce que la morale ne sauve personne. L’info, oui.

🔥 Parce qu’un festival d’art numérique et la RdR ont plus en commun qu’on le croit : une autre vision du futur.

« Dans l’histoire de la RdR, tout a commencé avec des seringues distribuées illégalement. Et aujourd’hui, c’est la norme. » – Romain

À nous d’inventer la suite.

ÉCOUTE, DÉBATS ET (PEUT-ÊTRE) REMISE EN QUESTION

🎧 Cet épisode bouscule, et c’est tant mieux.
🔗 Écoute le podcast ici :

 

🗣️ Et toi, tu mets la limite où ?

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