
Douleurs fatales pendant, mais aussi avant et après les cycles menstruels, au moment des rapports sexuels ou tout simplement en se rendant aux toilettes ou en se levant le matin… Non, tu n’es pas trop « chochotte », comme on l’a bien trop souvent répété, et non, se rouler par terre de douleur pendant ses règles n’est pas normal ! Tu es peut–être même atteint.e d’endométriose.
MÉCONNUE, MAL SOIGNÉE
L’endométriose, c’est un problème de société pour ne pas dire le mal du siècle : une personne menstruée sur dix en souffre. Maladie hormono–dépendante et inflammatoire chronique, elle débute aux premières règles – mais peut se déclarer plus tard – et s’estompe à la ménopause – et pas dans tous les cas de figure en plus, ce qui constitue tout de même un temps non négligeable dans une vie ! Et quand on souffre de douleurs chroniques, c’est tout le quotidien et en conséquence la qualité de vie qui s’en trouvent impactés.
Dans des sociétés capables de guérir des cancers, on est en droit d’imaginer que si une maladie fait des ravages à grande échelle, une profusion de traitements pour soulager ses douleurs doit exister, et qu’on est en capacité de la soigner de fond en comble. Douleurs pelviennes même pendant le syndrôme prémenstruel, nausées, crampes, spasmes, infertilité, maux de tête et de ventre, troubles digestifs, règles hémorragiques, lésions et dans certains cas tumeurs, les symptômes ne manquent pas. Et pourtant, obtenir un diagnostic est un réel parcours du combattant, et dans la lignée un traitement, pour peu qu’il en existe.
LA GRANDE OMERTA DE LA RECHERCHE MÉDICALE
En effet les obstacles sont multiples : le tabou entourant les règles et la santé gynécologique de manière globale, le manque d’éducation à la santé sexuelle et un système patriarcal réduisant les personnes menstruées à de simples appareils reproductifs, en plus d’un corps médical composé pendant des siècles de professionnels essentiellement cis masculins – même si on observe toutefois une évolution vers plus d’inclusivité ces dernières décennies – n’ont pas aidé les recherches à triompher du problème.
Ainsi, il n’existe que des théories et des hypothèses quant à l’origine de l’endométriose. Elle se caractérise par un reflux anormal par les trompes de sang menstruel qui ne s’évacue pas. Chemin inverse faisant, on observe alors la présence de cellules de l’endomètre qui migrent anormalement pendant le cycle menstruel vers les organes génitaux créant des lésions, notamment au niveau des ovaires et vagin, et parfois le rectum, le colon, la vessie…
Les solutions proposées sont souvent hormonales dans le but de bloquer l’évolution, ce qui ne guérit pas la maladie en elle-même. Celle considérée comme la plus « efficace », ou en tout cas la plus recommandée, demeure la prise d’une pilule contraceptive en continu afin de bloquer la venue des règles, ce qui entraîne aussi de manière quasi récurrente de nombreux effets secondaires pour le moins incommodants, si ce n’est dangereux, sans assurer d’une réussite garantie.
En outre, il n’existe pas de traitement miracle et d’uniformité pour les patient.es, car si l’on distingue plusieurs grandes catégories ou familles d’endométrioses, chaque endométriose reste spécifique en fonction des personnes et réclame un suivi bien à elle.
S’ORGANISER FACE À LA DOULEUR
Comme si cela ne suffisait pas, la gestion de la douleur, encore plus si l’on est diagnostiqué.e tardivement, demande d’avoir recours à des médecins spécifiques (kiné, ostéo, neurologues…). Et plus la maladie a été détectée tard, plus la fréquentation des centres antidouleurs fait partie du quotidien, pour peu que l’on ait les moyens et/ou des rendez-vous dans des délais raisonnables au vu de l’attente considérable.
Face aux douleurs pelviennes et autres crampes menstruelles, c’est souvent dans les antidouleurs et les anti-inflammatoires divers, voire dans l’automédication à travers des consommations de produits, que les publics touchés peuvent trouver un moyen temporaire de soulager leurs douleurs.
Affaire à suivre donc, car les nouvelles générations se mobilisent pour crier leurs inégalités face à la science et à l’errance qu’elles subissent, et souvent à travers les réseaux sociaux. Il s’agit tout d’abord d’échanger des skills et de trouver une communauté à qui parler, qui se comprend. Mais pas que ! Ces plateformes constituent à présent un véritable relais du militantisme et de l’engagement dénonçant les politiques de santé publique, et imposent la lutte contre l’endométriose et les violences gynécologiques, la précarité menstruelle et l’errance médicale comme un réel marqueur du féminisme contemporain.
Face à ces voix qui s’élèvent, l’endométriose commence à faire parler dans le débat public, forçant les politiques à entamer des démarches pour faciliter l’accès aux soins et développer la recherche. Car il ne suffit pas que les concerné.es s’autodéterminent, il s’agit à présent que l’entourage et la société tout entière prennent conscience et accompagnent les personnes touchées dans leurs quotidiens et leurs parcours de soins. En bref, il s’agit d’une lutte collective dont l’État, et même les entreprises ne peuvent se dissocier.
Avec ces mobilisations d’ampleur, le gouvernement lui-même a décidé d’adopter une stratégie de lutte nationale contre l’endométriose, couplée à celle contre l’infertilité. Ce sont donc 30 millions d’euros qui devraient être injectés dans ce sens, axés notamment sur la recherche. S’il était naturellement temps que cette maladie qui concerne des millions de personnes se voie attribuer un budget fléché, les coupes budgétaires prévues n’augurent cependant rien de bon sur les tenants et les aboutissants de ce grand projet. Les ressources proposées semblent aller dans le bon sens, mais il serait temps à présent de les voir se concrétiser, et de les rendre inclusives.
Car ne l’oublions pas, la médecine est également le grand théâtre de la reproduction sociale. Les déserts médicaux, la précarité, le racisme ordinaire, le fait d’être usager.e de drogues, la transphobie, sont des barrières supplémentaires dans l’accès aux soins, et compliquent ces parcours déjà bien meurtris. D’où l’urgence d’une prise de conscience collective !
PS : Notre sexualité, nos parcours, nos errances médicales sont multiples et variés, et l’on peut parfois se retrouver seul.e face à ses douleurs ou à ses questionnements. Mais pour t’accompagner, il y a toujours le 3615 KEPS, notre temps d’écoute safe et bienveillant, un aftercare de qualité !
Tous les mercredis et jeudis de 14 à 17h, slide dans nos DM pour prendre rdv !