Crédit photo : Carolina Herrera, Casablanca, Bottega Veneta, Balmain, Alexander McQueen, Balenciaga et Madmoizelle
Crédit photo : Carolina Herrera, Casablanca, Bottega Veneta, Balmain, Alexander McQueen, Balenciaga et Madmoizelle

Menstruations : sur la plage abandonnée

Publié le 10 février 2025 par Meureh

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Cet article parle de : #sante-sexuelle #sexualite

Aujourd’hui, l’armée rouge a débarqué, et on te parle essentiellement… des règles !


Eh oui, c’est le sujet « touchy » par excellence. « C’est dégueulasse », « C‘est normal d’avoir mal, fais pas ta chochotte », « 5 balles la boîte de Tampax ?! », « T‘es de mauvaise humeur, t’as tes règles ou quoi ? »… Autant de douces rhétoriques dans lesquelles nous avons été baigné.es dès qu’il s’agissait d’aborder la question des menstruations. La liste est longue quand il s’agit de se remémorer les phrases les plus déplacées, et ce, dès le plus jeune âge. Mélangeons à présent ce mépris et cette ignorance aux consos, et nous accouchons de la stigmatisation la plus dédaigneuse qu’il soit. Le souci, c’est que ce n’est pas juste de dédain, c’est aussi très dangereux.

LE SERMENT D’HYPOCRITE

Les rgles, c’est l’obligation mensuelle qui concerne à peu près la moitié de l’humanité. Pas négligeable, et ce sont pourtant les grandes oubliées de la recherche en santé. Curieux et pourtant sans surprise, lorsqu’on sait que celle-ci a été effectuée à l’aube de ses débuts et essentiellement depuis par des hommes cis. Les progrès quant à la parité dans le milieu médical sont toujours timides. Alors, l’auto-proclamé « sekks fort », les vat’enguerre et amateurs de viande bleue auraient ils finalement peur du sang ? Ou plutôt, toutes les problématiques ne les concernant pas ne les intéressent somme toute qu’assez peu ?

Dans la même dynamique, nous pouvons ajouter à cela la toxicophobie : la France, qui s’illustre en étant l’un des pays les plus consommateurs de médicaments et de vin, aurait-elle peur de la drogue ? Entre politique de répression et blâme des usager.es, il semblerait que oui. 

L’un dans l’autre, vous avez la recette parfaite d’une invisibilisation totale.

Au milieu de cette modernité discutable, quelles conséquences concrètes pour les personnes concernées ? Quelles perspectives aussi ?

EN ROUGE ET NOIR

En décembre, face à ce manque crucial d’informations, de données et les conséquences de timides politiques de santé publique, nous avons interrogé notre communauté sur l’intersectionnalité entre les consos et les drogues. Et nous n’avons pas été déçu.es ! Ce fut un moyen de dégager les grandes tendances automne/hiver 2025 : retour du rouge carmin ou grand absent des podiums

Indéniablement, les consos impactent le cycle menstruel. Arrêt des rgles, cycles perturbés, saignements imprévus… Pour certain.es, c’est le retour à la normale après l’arrêt des consos. Pour d’autres, on constate des interactions entre produits consommés et menstruations à travers des effets physiques, émotionnels et psychologiques. Des extraits de témoignages seront plus parlants que de grandes explications tu peux les retrouver à la fin de l’article ou en post tous les mercredis durant l’intégralité de la campagne. 

LE RADEAU DE LA MÉDUSE 

Les manquements de la recherche médicale sont flagrants et ils ont des conséquences : c’est parfois par choix que les usager.es s’automédiquent en utilisant des substances pour tenter de soulager leurs douleurs, et on peut déjà en identifier certaines à défaut de savoir les soigner. Il y a notamment celles liées à des maladies spécifiques qui accompagnent les cycles hormonaux, en tête la moins méconnue : l’endométriose. Eh oui, ce calvaire mensuel qui touche une personne menstruée sur 10 prend déjà plusieurs années à être diagnostiqué. Une fois le diagnostic obtenu, ne comptez pas vous soigner de sitôt : il n’y a tout simplement pas de remède et les centres antidouleur, pour peu qu’on obtienne un rendez-vous avant deux ans, piétinent, les patient.es avec. 

Mentalement, c’est la guerre des nerfs également. Dépression, anxiété, dysphorie, on a toustes une bonne raison de consommer pendant ces ascenseurs émotionnels qui commencent pour beaucoup dès le spm (syndrôme prémenstruel), qui fait partie intégrante du processus hormonal. Vécu très difficilement par nombre de personnes, le spm est de surcroît invisibilisé, carrément inconnu. Et les consos surviennent à nouveau pour accompagner ces périodes troublées.

VIENDRA LE TEMPS DU FEU

De toute cette ignorance et cette stigmatisation découlent naturellement des difficultés à trouver des réponses adaptées dans les circuits médicaux et même associatifs.

Encore une fois, face à ce désolant constat nous répondons autosupport… et bataille idéologique. La question des menstruations est une composante sérieuse de la santé sexuelle et donc inhérente à notre sexualité. Il nous semblait primordial de l’intégrer à notre campagne, et également à nos connaissances en réduction des risques qui se doit d’être sans cesse en apprentissage. 

Parles-en autour de toi, c’est ensemble que l’on peut créer des espaces d’échanges sécurisés, pour briser les interdits qui nous pèsent, pour recueillir de notre propre initiative des témoignages et des données. En partageant nos expériences, on enrichit nos connaissances aussi… Et on est mieux armé.es.

PS : Notre sexualité, nos parcours, nos idées de genre, notre vie sexuelle sont multiples et variés, et l’on peut parfois se retrouver seul.e face à ses douleurs ou à ses questionnements. Mais il y a toujours le 3615 KEPS, notre temps d’écoute safe et bienveillant, un aftercare de qualité !

Tous les mercredis et jeudis de 14 à 17h, slide dans nos DM pour prendre rdv !

Voici vos extraits de témoignages extrêmement parlant (l’équipe de KEPSmag vous remercie de votre confiance !) : 

Témoignage 1/5 :

« Depuis deux ans maintenant, je suis une très très très grosse consommatrice de kétamine ce qui engendre chez moi un gros problème.

Lors de mes règles qui sont très douloureuses, je consomme davantage. Le fait de pouvoir se détacher de mes crampes interminables est d’un tel soulagement.  Mais parfois trop défoncée j’oublie totalement la présence de mes règles.  J’oublie de me protéger ou alors j’oublie de changer de protection. Je sais que pour quelqu’un d’entre guillemets normal cela peut choquer. 

Malheureusement on ne choisit pas, c’est une addiction et ce qu’elle engendre, pour ma part c’est le manque d’hygiène. »

 

Témoignage 2/5 :

« Pour situer, femme cis de 27 ans, j’ai eu un diagnostic d’endométriose suite à des douleurs énormes après un avortement à 19 ans. 

Je n’ai pas eu de douleurs pendant sept ans et c’est revenu depuis quelques mois (yeyyy) et je dois repasser un IRM bientôt pour confirmer le diagnostic. 

En tout cas je fume du cannabis ou cbd quand j’ai vraiment trop mal pendant mes règles ou l’ovulation, ça soulage.

J’ai aussi constaté plusieurs fois sous LSD que des douleurs à l’utérus apparaissaient parfois, même en dehors des règles, et juste pendant la durée du trip 🤷🏻‍♀

Et évidemment l’alcool et le tabac augmentent les douleurs de règles chez moi. »

Témoignage 3/5 :

« De manière générale quand la conso t’envoie déjà aux chiottes, mais qu’en plus t’as tes règles c’est galère.

No comment sur les clubs : chiottes sales, manque de papier, pas de lavabos pour laver les cups, bref… en teuf c’est la même pas pratique et faut tout avoir sur toi (donc si ca débarque à l’arrache t’es encore plus dans la m****).

Les excitants ça force sur les intestins, mais les crampes aussi… j’ai de l’endométriose, résultats j’ai déjà eu hémorragie + hémorroïdes + contractions et c’est pas super ! Donc ça m’arrive de prendre de la ké pour la douleur… même si le plus souvent je prends de la codéine, ça dure plus longtemps.

Les excitants enflamment les douleurs, mais avec la perte de sang et les douleurs je suis tellement crevée que j’en prends quand même pour tenir si y a une soirée. Par contre ma prise de ké ou de codéine c’est tous les 28 jours, pas le choix… enfin si, retirer cet utérus, ne plus souffrir, ne plus être gênée et vidée de tout ce sang.

Voilà ! J’espère que ça vous sera utile ! »

Témoignage 4/5 :

« Du coup personnellement je suis atteinte d’endométriose diagnostiquée depuis maintenant trois ans à peu près. Sachant que ça fait des années que j’en souffre sans savoir en fait, et surtout à l’époque je n’avais littéralement aucun moyen que la douleur cesse. C’était absolument invivable, et ça a continué même après le diagnostic de la maladie puisque aucun des médicaments que l’on m’a prescrit pour aider n’a marché.

Et en fait ça a énormément participé au fait que j’ai commencé à consommer, d’abord juste du cannabis. J’ai connu une pote qui avait des big douleurs, pas d’endo pour elle en tout cas pas diagnostiquée mais la fume l’aidait beaucoup là-dessus. Du coup, j’ai été lire des témoignages et j’ai vu que pas mal de personnes étaient dans ce cas. J’ai commencé à un moment où j’étais pas hyper bien dans ma vie, du coup ça m’a aidé sur ça en plus mais vraiment pour moi en tout cas sur l’endo ça a vachement aidé. Les premières fois que j’ai fumé pendant des crises de douleur limite j’avais l’impression que c’était magique, évidemment ça diminue quand même beaucoup l’effet antidouleur avec le temps, mais ça me permet quand même de pouvoir calmer et pas juste rester pliée en boule quand j’ai trop mal. Ça m’a aussi bien sauvée sur le stress, parce que clairement les menstruations ça engendre vraiment un stress, littéralement j’ai peur d’avoir mal mdr ça fait partie des premières pensées quand je me réveille. Avant de fumer j’avais l’impression un peu que ma vie ne tournait qu’autour de ça j’avais tout le temps peur d’avoir mal et quand j’avais des douleurs je faisais juste tout pour le cacher. La fume ça me permet vachement de me détacher de ça.

Par contre, j’ai un autre ressenti sur la MDMA, je sais pas si d’autres gens ont vécu ça mais ça joue à mort sur les douleurs. Peut-être que c’est parce que la substance tape sur les reins, mais en tout cas en lendemain de MD j’ai toujours des énormes douleurs. »

Témoignage 5/5 :

« Il faut tout d’abord savoir que j’ai eu mes premières règles à mes 13 ans, ce que je vais vous raconter se déroule à mes 15 ans, je prenais la pilule. À ce moment, je consommais de tout sans trop abuser, sauf la kétamine. J’en consommais plusieurs fois par semaine, si ce n’était tous les jours. Je me suis retrouvée avec des tests de grossesse dont je ne pouvais savoir si le résultat était fiable ou non, des règles absentes pendant un mois ou plus, ou qui des fois arrivaient avec une semaine d’intervalle. Au niveau des douleurs ça me faisait beaucoup moins mal (je fais de l’endométriose) mais la douleur des reins, ça c’était une tout autre histoire. »

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