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Un bord de mer avec un tonnelet de rhum, mais qu'est-ce qui pourrait mal se passer ?

Témoignage | Toutes ces phases de déni (DryJanuary 2025)

Publié le 29 janvier 2025 par X

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Cet article parle de : #alcool #temoignage

Dans ce témoignage issu de nos anciennes publications, X raconte comment un déménagement inopiné à mis en lumière un souci de consommation d’alcool


« Je crois que j’ai toujours bu.

Dans les familles, d’abord, très jeune. Mes parents vivent dans une région viticole. Puis, en école d’ingé, les fameux « open bar », les beuveries en groupe, avec souvent de l’alcool de mauvaise qualité, tout ça ancre des habitudes en soi.

J’ai attendu 38 ans et cette année 2023 pour me poser les bonnes questions. Je suis de nature assez hyperactive et nerveuse, pour moi l’alcool a toujours été associé au plaisir et à un côté festif. Je bois rarement quand je suis triste, mes plus grosses ivresses, dans la quasi-totalité des cas, eurent lieu dans des contextes d’euphorie, de fête, de camaraderie…

Je suis quelqu’un de foncièrement heureux, j’ai plutôt pas mal réussi dans la vie, j’ai une copine aimante, je suis bien entouré, une famille soutenante et des potes solides. J’aime l’effet de l’alcool, surtout du premier verre, avec ce moment de détente ou tu sens ton corps se relâcher.

LES DEUX PIEDS DEDANS

J’ai vécu depuis 15 ans sous les tropiques, où l’été toute l’année facilite grandement les apéros, les afterworks et la consommation. En 2023, j’ai déménagé, sur une île productrice de rhum (ce qui n’était pas le cas auparavant)… et là, ce que je craignais est arrivé. Les deux pieds dedans. Ce qui était dissimulable auparavant ne l’a plus été, le rhum a envahi mon quotidien. Des ti-punchs festifs, c’est devenu les rhums ambrés de qualité à 80 euros la bouteille seul chez moi, verre après verre. Toujours en s’occupant, en travaillant, en écoutant de la musique, en écrivant, même si je savais qu’il y avait un côté anormal à ce comportement, j’y trouvais toujours des circonstances atténuantes, soit des explications, soit une justification par le plaisir. Et j’ai commencé à me tomber la bouteille entière (à 40°). Tout ceci est arrivé en l’espace d’un an.

Et puis l’ultimatum de ma copine est arrivé, suite à des trous noirs, des mises en danger, c’était elle ou mon addiction. Cela m’a pris vingt-trois ans de consommation pour vraiment me poser, pousser la porte d’un centre d’addictologie et faire le point. Et j’ai commencé à me remémorer toutes ces phases de déni, à me poser ces questions :

    • pourquoi je suis souvent le plus bourré de l’équipe ?
    • Pourquoi je suis celui qui descend ses verres deux fois plus vite que ses camarades ?
    • Pourquoi je suis celui qui a un goût de « reviens-y » si prononcé ?
    • Pourquoi je suis le seul qui ne sait pas s’arrêter ?

J’AI ENLEVÉ MES ŒILLÈRES 

Je suis sous traitement médical depuis deux mois, j’y était très réticent… mais je dois avouer que l’effet du médicament sur la sensation de « craving » et le côté « reviens-y » est assez hallucinant. Je n’ai pas totalement arrêté de boire, j’ai supprimé le rhum. Et je n’ai plus eu d’épisodes d’ivresses depuis ces deux mois. 2024 s’annonce pleine de défis, mais 2023 aura été l’année pour moi où j’aurai enlevé mes œillères, j’en parle désormais librement, sans gêne, auprès des gens que j’aime, et ça, c’est quand même loin d’être anodin.

Cette drogue légale est de loin la plus pernicieuse que je connaisse (et j’en connais quand même un rayon). Elle est tellement ancrée dans les us et coutumes de notre pays que les gens ne se rendent même plus compte des troubles de la consommation qu’ils ont. Mais si je dois donner un conseil, c’est, allez pousser la porte d’un centre d’addicto si vous en ressentez le besoin, ça aide. Bon courage à tous. Et merci encore pour la page. »


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