Dans ce témoignage, X nous raconte comment une initiation « tardive » a conduit à de nombreuses mises en danger. Avec un recul certain, X liste les risques pris à l’époque et revient sur les consommations associées.
« L’alcool est entré dans ma vie, comme pour beaucoup, en tant que vecteur social. Mais cette conso est pour autant arrivée « tardivement » (au lycée), bien que présente de façon transgénérationnelle de par mes origines roumaines, et d’autant plus banalisée culturellement.
D’aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais eu de mal à sociabiliser, j’ai toujours été extravertie, à aller vers les autres, et n’avais aucun intérêt manifeste à consommer quoi que ce soit, jusqu’à une soirée où le premier verre et la première clope entrent en scène.
Je n’ai pas de souvenir d’avoir eu un rapport problématique à l’alcool tout de suite, mais c’est comme si ça avait toujours été là, en fond, dans un contexte toujours festif (avec des gens + dans des bars/boîtes/soirées en tout genre), comme si ça légitimait (spoiler alert : non). Je bois compulsivement et n’ai pas de limite.
Puis, premier appart, premières bouteilles de vin seule occasionnellement (mais en y réfléchissant, ça entretenait cette espèce d’archétype de la meuf célibataire seule chez elle avec son verre à pied et sa clope au bec).
Je passe le permis, je conduis les Autolib (tah l’époque), et quand je ramène mes potes en fin de soirée, l’alcool n’est pas un facteur de considération.
Je change de vie, je retourne enfin dans ma ville natale, projet attendu depuis toujours. L’alcool est toujours là, plutôt régulièrement mais toujours sous couvert de festivités, donc ça passe, tu comprends. Puis à ça se joignent d’autres consos, stimulantes elles, qui permettent de boire encore plus.
J’entre en relation avec quelqu’un qui consomme quotidiennement et on habite ensemble donc ça n’aide pas à diaboliser cette substance. Mais ça m’a permis de comprendre ce que c’était de passer après, et donc la place prioritaire que prend la substance. Être un élément du décor pendant que la personne en face enchaîne les verres, les violences mutuelles, les comportements impulsifs et agressifs qui sont dupliqués, et les prises de risques, surtout, qui continuent encore et toujours. Évidemment, le tout sous anesthésie, complètement dans l’inconscience, supplément minimisation finalement.
Entretemps, j’ai ma première voiture, élément déterminant dans cette histoire. Je lui voue une passion, elle représente bien plus que du simple matériel, c’est ma liberté, mais l’alcool la concurrence malheureusement trop bien.
Je me souviens d’une fois où on rentrait du bar avec une amie, complètement ivres, chacune dans sa voiture, Marseille/Vitrolles, nuit noire, torrents de pluie et de mistral, en Fiat 500 à + de 100 km/h. On voyait pas à 1 mètre, les roues étaient ensevelies sous l’eau, mais à aucun moment ça n’a été un problème. Un tel sentiment d’invincibilité, et surtout tellement de risques. Je me demande encore à ce jour comment je peux en être à écrire ces lignes.
On en est donc rendu là : j’exerce le métier de mes rêves, je suis sortie d’une relation toxique, j’habite dans l’appartement de mes rêves avec le chat le plus merveilleux du monde, et pourtant la défonce, encore et toujours.
Et quand la défonce n’est pas explicite, elle se cache derrière les moments entre copines (la bouteille de blanc à 3 €, les margha du Petit Nice) et ce, 3 fois par semaine. Ces rituels morbides que je pense être des escapades sont en fait des moments d’autodestruction.
Malgré les -800 € sur le compte, un accident qui m’a confrontée à la mort et la fin d’un contrat avec un employeur abusif. Ça ne suffit pas, j’ai toujours besoin de plus, et il faut que ça me mette minable. Il faut que je m’oublie, que je m’évade, et quel autre moyen plus accessible ?
Jusqu’au moment où c’est la fois de trop. C’est la dispute de trop avec quelqu’un de cher et c’est la balance qui penche plus du côté des risques que des bénéfices. Enfin. C’est comprendre que je ne veux plus privilégier cette vie d’errance et ce suicide lent, et que cette fois, l’idée abstraite de l’abstinence s’offrait à moi comme une solution. Pour la première fois. Aujourd’hui, ça fait 41 jours de sobriété et j’espère pouvoir dire un jour que je suis ivre de vie. »
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