Alors, l’AFD, qu’est-ce que c’est et pourquoi ça pose de sérieux problèmes de droit ?
L’usage de drogue est pénalisé dans le droit français depuis la loi du 31 décembre 1970. L’amende forfaitaire délictuelle (AFD) est un dispositif qui voit le jour dans le droit français en 2016. Concernant l’usage de drogue, le dispositif est expérimenté à partir de juin 2020. Le 1er septembre 2020, le dispositif s’étend au niveau national. On voit ainsi que le temps de réflexion et d’évaluation du dispositif est particulièrement réduit, voire absent.
C’est une amende de 200 euros, qui peut être réduite à 150 euros si on paye dans les quinze jours, ou passer à 450 euros si on ne paye pas sous 45 jours. L’amende s’applique aux personnes majeures, qui n’ont pas commis d’autre infraction que l’usage, en possession de papiers d’identité. Il faut accepter le principe de la verbalisation (donc signer le PV) et le principe de la destruction immédiate du produit. L’amende ne concerne que le cannabis, la MDMA et la cocaïne.
L’AFD est souvent présentée comme un allègement des procédures, mais c’est également une façon de re–pénaliser l’usage, puisqu’on constate que le nombre de condamnations pour simple usage était relativement bas avant sa mise en place. C’est un moyen de systématiser la pénalisation, sans passer par les tribunaux et de manière beaucoup plus rapide. Ce sont les agents de police eux-mêmes, sur place, qui ont les moyens de condamner (et plus uniquement d’enquêter). Attention, ce n’est pas parce que l’on ne passe plus devant un tribunal que c’est moins grave ! Ce n’est pas une contraventionnalisation : l’amende demeure une sanction pénale inscrite au casier judiciaire, seulement vous n’avez plus le droit de vous défendre devant un juge.
Respecter les droits et l’égalité entre les usagers
En quoi ça pose problème ?
- Problème d’accès à la justice : plus d’accès à un juge, plus de débat contradictoire, plus de présomption d’innocence, plus d’individualisation des peines, plus de principe d’opportunité des poursuites (le procureur décide lui-même de poursuivre ou non).
- Difficultés majeures dès le constat de l’infraction : risque d’arbitraire et d’erreur de qualification des faits.
- Difficultés dans la réception : très peu d’informations, envoi d’une lettre simple, etc.
- Un mode de contestation qui porte atteinte au droit au recours : les règles sont très complexes et obligent la personne à avoir le montant (élevé !) de l’amende bloqué sur son compte pour pouvoir contester.
Récemment (mai 2023), c’est la Défenseure des droits elle-même qui recommandait de mettre fin au dispositif : « La Défenseure des droits recommande, devant les atteintes majeures aux droits et à l’égalité engendrées par la procédure de l’AFD, de mettre fin à cette procédure et de revenir à une procédure judiciaire pour tous les délits afin de respecter les droits et l’égalité entre les usagers.»